"Pour le festival \*, tu es aux explications de quels jeux ?"
"Pour le moment, je suis sur Mombasa. Pas mal de règles mais après deux parties je suis au point je crois, cela dit, il y a quelqu'un d'autre pour l'expliquer..."
"Ah... alors du coup, ça te dirait de présenter également Ekö à une table à coté ? Les règles semblent assez courtes."
Ekö ? Ah oui, c'est cette boite de chez l'éditeur Sit down! avec une illustration assez mystérieuse et de jolies couleurs sur le couvercle, je l'avais remarquée parmi d'autres jeux qui attendaient d'être installés sur les tables. Et c'est donc ainsi que je suis rentré à la maison avec un Ekö sous le bras afin d'en apprendre les règles.
Avec cet avis, je vais commencer une petite série sur des jeux que l'on peut qualifier d'abstraits pour diverses raisons \*\*. Alors à moins que Syssyphus viennent à nouveau me corriger comme pour Dschunke, à ma connaissance, Ekö n'est actuellement plus édité : Tapez oui si c'est exact, me tapez pas si c'est faux.
Dans Ekö, Le but du jeu est simple : devenir l'empereur d'Ekö. Il y a un petit texte pour thématiser un peu le jeu. Pour cela, il vous faudra combattre vos adversaires avec des pions-soldats menés par un "empereur" un brin auto-proclamé (vous quoi...) mais aussi ériger des bâtiments sur différents types de terrain.
Ekö est donc un jeu d'affrontements directs et de constructions avec deux fins possibles : Soit un joueur, par ses réalisations, arrive à 12 points en ayant de plus un bâtiment sur un hexagone "Capitale", soit un joueur a trouvé le moyen de se retrouver seul (uniquement en terme de pions-soldats, les bâtiments ne comptent pas) sur le plateau. Bâtir ou anhiler, telles sont donc les deux voies vers la victoire.
Construire consiste à installer des bâtiments (Campements, Tours et Châteaux) selon des règles liées aux terrains choisis où aux bâtiments remplacés avec dépense de pions-soldats adjacents. Il est possible aussi de retirer un batiment adverse en le remplaçant par un des votres. Le plateau, que l'on compose en fonction de la configuration, n'est jamais le même ainsi que l'installation initiale des pions-soldats. Combattre consiste à éliminer des troupes ennemies suite à un déplacement et par effet d'empilement majoritaire ; On pense alors à certains mécanismes dans les jeux de Chris Burm, comme pour la mise en place de départ d'ailleurs. Attention cependant au Kamikaze : un seul pion peut détruire une pile de quatre, une belle subtilité du jeu.
Je vais pas plus entrer dans les détails en exposant d'autres règles (comme la possibilité de capture d'un empereur adverses, les échanges de prisonniers, le système des renforts et des conditions de poses, etc...), vous trouverez des vidéo-règles pour cela mais simplement vous dire que selon moi, ce jeu de Monsieur Henri Kermarrec est l'un des meilleurs jeux abstraits sortis au cours de ces dix dernières années.
Le matériel est élégant et de qualité, les règles sont claires, il y a de belles couleurs, les illustrations de Lucy Mazel font entrer dans l'univers du jeu. Pour les connaisseurs, je trouve qu'il y a un lien de parenté entre l'une des factions et le personnage de "La force vitale de la Terre" dans Spirit Island. Après, durant la partie, on peut vite oublier le thème mais quand même, divers petits éléments donnent beaucoup de charme à l'ensemble.
Ekö, c'est assez violent, mais surtout, il pose aux joueurs des problèmes de choix tactiques et stratégiques durant toute la partie. On peut pas jouer des coups d'une manière trop légère sous peine d'ouvrir des possibilités inattendues à votre adversaire. J'y ai joué essentiellement à deux et à trois. En duel, la stratégie de placement est à l'honneur, il faut avoir une bonne lecture du jeu avant de commencer à manœuvrer. A trois ou plus, l'échange de prisonniers a quelque chose de piquant, mais évidemment, le danger est moins facile à anticiper et encore plus qu'à deux joueurs, il faut savoir consolider vos positions sans être trop passif.
J'ai lu dans certains avis des comparaisons avec le jeu de Dames... je voudrais pas sembler sévère mais c'est vraiment réducteur, voire un peu saugrenu. Comme je le dis plus haut, on est plutôt proches de mécanismes façon projet Gipf.
Durant le festival auquel je faisais référence, j'ai passé beaucoup de temps à la table d'Ekö car il y avait toujours une petite file d'attente pour y jouer (on avait un seul exemplaire du jeu) ; Or, j'ai vu arriver plusieurs profils de joueurs, un père avec sa fille de 10 ans, un couple d'un certain âge, trois geeks qui venaient d'une partie de Mombasa, trois copines un peu dépitées qui s'étaient faites sortir d'une partie de Loup-garou, deux de mes compagnons ludiques habituels qui ont insisté pour que je fasse une partie avec eux, etc... Point commun de tout ces gens là ? Le sourire en fin de partie, quelques commentaires sur ce qui s'est passé et surtout l'envie de faire une revanche immédiate ! Et personne ne m'a dit "Ah oui, c'est comme aux Dames..."
Ekö, c'est beau, c'est solide, c'est subtil, il a été primé à Boulogne Billancourt (sous le nom de Uma Jirushi) et je ne sais pas quoi vous dire de plus à part d'essayer à l'occasion de vous procurer une boite de cette perle qui risque l'oubli.
\*Festival du jeu de Montpellier en 2015.
\*\* Vous remarquerez ma prudence, aussi ne comptez pas sur moi pour avancer la moindre définition.