Je me suis réveillé ce matin en grande forme (pas de cours à l'université pour votre humble chroniqueur), mais en vue, une toute première partie du nouveau Combat Commander (CC) de GMT dont il a été question sur ce site, et dont plusieurs, je crois, attendent les premiers échos. Alors, voici, dans le détail, nos deux premières parties, ainsi que mes impressions et commentaires.
Ceux qui ne sont pas intéressés par le compte rendu peuvent évidemment se rendre directement à la section « commentaires ».
DAS SPIEL - Du point de vue du matériel, CC se compare aux autres jeux de la gamme GMT, c'est-à-dire que la carte est assez moche côté graphique, car conçue pour être plus pratique qu'esthétique, et elle n'est pas montée, mais les jetons sont jolis, les cartes et les aides de jeu également.
D'emblée, le sort me désigne comme commandant de la Wehrmacht pour une mission difficile (le premier scénario), car les Allemands disposent de deux fois moins d'unités et d'armes que les Russes. Ils profitent cependant d'un certain avantage de position. Le hasard de la pioche des objectifs fait en sorte que le 5e, une ferme au sud de la carte, vaudra 10 points, un coup dur pour les Allemands, puisque les Russes pourront concentrer leurs forces, qui sont considérables, sur un seul objectif.
Le Russe doit bouger en premier, mais l'Allemand a la chance de jouer la carte "initiative" pour renverser cet avantage. La malchance frappe immédiatement: la confusion règne dans le camp allemand et les commandants n'arrivent pas à mettre leurs troupes au pas (pas de cartes "Move"), l'Allemand passe un tour pour changer ses cartes. Le Russe s'empare de l'initiative, ses troupes avancent rapidement à travers la forêt pour s'emparer de l'objectif, mais ils sont encore à 150 mètres quand l'Allemand, à peine sorti de sa torpeur, ne peut utiliser qu'un "Advance" pour mieux positionner ses troupes. Le Russe se lance, l'Allemand est toujours à découvert au sud, mais il est placé pour tirer sur les troupes Russes qui foncent à travers un champ de blé en direction de la ferme. La malchance frappe encore: apparemment désorganisées, les troupes allemandes manquent leur tir à 5 reprises. Les Russes sont sur l'objectif et n'attendent pas: pendant l'assaut de l'avant-garde, les canons, restés en arrière, font feu sur l'infanterie allemande. Malgré une chance de réussite plutôt faible, le tir est juste et un squad traînant un MG 34 est atteint. Les Allemands ont repris leurs capacités motrices: avec l'énergie du désespoir, une unité allemande se cache du feu ennemi dans un grange à 50 mètres de la ferme, une autre s'enfuit dans la forêt, espérant empêcher la sortie d'un deuxième groupe d'escouades russes qui avance à l'est. Le russe répond à ces déplacements par un tir...
EVENT ! L'unité allemande en déroute est éliminée, le commandant se retrouve seul en pleine campagne et reçoit le feu ennemi. Les Allemands, loin de l'objectif et déjà affaiblis, abandonnent la partie.
DEUXIÈME PARTIE - Les rôles sont inversés. Cette fois, tous les objectifs (5) valent deux points, ce qui favorise un peu l'Allemand qui est proche de trois d'entre eux, mais un « random chit » double la valeur d'un objectif près des Russes. Je perds l'initiative, et l'Allemand, cette fois capable de lancer ses troupes en premier, s'empare immédiatement des objectifs au sud. Battus de vitesse à cet endroit, le Russe décide de lancer ses troupes à l'est, déserté par les Allemands. En deux tours, un squad et un leader ont traversé la carte du côté allemand et marquent ainsi 2 PV. OKH est furieux, le commandant, penaud, maugrée dans sa ferme barricadée. Le sud, toutefois, est défendu par une MG 34 appuyée par un commandant efficace. Les Russes devront se positionner prudemment dans la forêt pour lancer une attaque groupée. Deux cartes d'Artillerie sont précieusement gardées à cet effet, mais elles limitent un peu la versatilité des soviétiques. En attendant, à leur tour, les Russes s'emparent de deux objectifs, dont celui ayant une valeur de 4. Le plan allemand s'effondre par absence d'une carte "fire" lors de ce tour - le Russe s'aperçoit bien vite que les tirs d'opportunité ne viendront jamais. Deux mouvements le placent dans une position superbe, au sud, pour l’attaque sur la ferme.
C'est alors que la poisse frappe encore. Lors des 4 tours suivants, les Russes sont incapables de bouger par manque d'une carte "move", même après avoir sacrifié l'une des cartes « artillerie ». L'une des cartes "fire" est utilisée, mais sans succès, car l'une des armes automatiques traîne à l'arrière avec le commandant, nécessaire, lui, aussi, pour le succès de l'assaut. Pendant cette attente, un sniper brise un squad russe et une attaque chanceuse élimine un autre squad russe au nord-est. La partie s'est arrêtée à ce moment pour des raisons extérieures.
COMMENTAIRES
Je n'ai pas du tout apprécié ces deux parties de CC, et voici la liste des critiques que j'ai formulées après ces deux parties. Il faut évidemment les prendre avec un grain de sel, car ce ne sont que deux parties, après tout.
LA GUERRE DANS LA BOUE: Je suis un amateur des card-driven, mais quand j'ai lu les règles de CC, je me suis demandé comment ce système, efficace pour représenter des événements de toutes sortes dans un jeu stratégique, pouvait être adapté à un jeu tactique. Mon premier tic concernait les règles pour l’OP (opportunity fire, une forme de tir qui interrompt le déplacement adverse à son tour) et le mouvement. Mes craintes furent confirmées. L’absence de cartes mouvement peut faire en sorte que les unités restent engluées dans la boue, parfois pendant plusieurs tours. Or, bien que le chaos et l’imprévisible soient souvent des éléments important à ce niveau (tactique), je ne vois comment on peut justifier cette paralysie totale de troupes qui ne sont même pas sous le feu ennemi. La progression des troupes est lente, statique, boguée. Des unités peuvent rester plantées au milieu d’un champ, à découvert, parce qu’elles ont commencé à bouger loin des unités adverses, puis trois ou quatre tours plus tard, elles sont encore au milieu de ce champ, même si deux MG et trois squads n’attendent plus que d’ouvrir le feu sur elles – et elles attendent toujours. Vous montez un assaut sur un objectif, vous vous arrêtez à 50 mètres, il n’y a pas d’unités ennemies à 500 mètres, puis deux tours plus tard, vous avez perdu l’objectif parce que vous n’avez pas pu avancer à l’intérieur.
OPPORTUNITY FIRE (or lack thereof). Certes, la prudence vous oblige à garder au moins une carte “Fire” à la fin de votre tour pour pouvoir tirer sur les unités ennemies pendant leur tour. En principe, ça fonctionne, surtout que l’adversaire ne peut pas savoir si vous en avez une ou non. En pratique, c’est parfois grotesque. La vérité, c’est que quand vous avez une carte mouvement, vous en profiter pour bouger le plus d’unités possible (radius de votre leader) – et vous devrez prendre des chances. Comme le joueur adverse peut tirer autant de fois qu’il le désire en OP une fois la carte jouée, il le fait généralement immédiatement. Lors de la deuxième partie, j’ai immédiatement remarqué que mon adversaire n’avait pas de carte « Fire » lors mon tour (ce n’est pas sa faute, il n’en avait pas, c’est tout), parce qu’il n’a pas fait feu sur mon premier squad. J’ai donc pu passer à travers 150 mètres de terrain vague sans que trois squads adverses, dont une MG 34 postés dans une ferme à 100 mètres, ne puissent ouvrir le feu sur mes 5 squads. Absurde et complètement injustifiable.
EXIT – Dans CC, une unité qui sort du côté adverse rapporte des PV dans presque tous les scénarios. Bon, d’accord. Le défenseur n’a qu’à bloquer son côté de carte. Sauf que dans CC, une unité qui sort sur un bord de la carte… revient au tour suivant en renfort de son propre côté ! J’ai fait ce sale coup au joueur allemand (qui ne dispose que de trois squads dans le scénario 1) lors de la deuxième partie, ce qui m’a rapporté 2 PV, et en plus, j’ai pu renforcer mon attaque au sud au tour suivant… bizarre. Que font donc ces unités qui sortent d’un côté ? Elles volent le drapeau, prennent l’avion, et reviennent en jeu ??
RECOVER – Vous avez finalement réussi à monter, péniblement, une attaque puissante, sur plusieurs tours ? Vous avez profité de trois ordres pour tirer avec l’artillerie, puis faire feu à deux reprises et vous avez finalement brisé trois squads adverses ? Ne criez pas victoire trop rapidement. Il n’y a rien de plus efficace, dans CC, que les cartes « Recover ». En un tour, voilà que toutes ces unités brisées sont remises à neuf, annulant un long et pénible effort d’assaut, car les troupes ont un moral élevé et le ralliement est très efficace.
EVENTS ! Je pensais que cet aspect serait pas mal, mais non, ce n’est pas le cas. Les events créent toutes sortes de situations extravagantes et parfois illogiques (un champ de mines où 5 squads viennent de traverser, par exemple), et il n’est pas facile d’accepter les coups du sort dans un jeu où les autres paramètres introduisent déjà par ailleurs beaucoup d’incertitudes et de hasard.
CONCLUSION – Comme vous l’avez compris, je n’ai pas du tout aimé mon expérience et je ne recommande pas CC, du moins après ces deux parties. leu jeu est lent, dépourvu de dynamisme. À réserver à ceux qui aiment un tactique TRÈS chaotique. Le seul avantage, c’est que quand vous perdez, vous avez toutes les excuses possibles et imaginables !