On me demande souvent comment je choisis les jeux que je vais ajouter à ma ludothèque. Question à laquelle, régulièrement, s’ensuit une autre : comment je sais qu’un jeu va nous plaire. Je n’ai pas vraiment de réponse toute faite puisque, parfois, certaines suggestions font des bides intersidéraux.
Choisir d’acheter un jeu est devenu un exercice instinctif, le fruit de mon envie de profiter de notre passe-temps commun sans trop avoir à me poser de questions. Et aussi à la chance d’avoir de nombreuses opportunités de jouer avec des groupes différents : groupes d’amis, en famille ou de voisins. Ce qui me permet de varier les plaisirs. Poncer la ludothèque tout en découvrant des nouveautés sans avoir à se prendre la tête. Éviter que la recherche du bon achat devienne plus importante que le plaisir de jouer.
Pour le plus grand nombre
En revanche, après des années de pratique ludique, je pense savoir rapidement, après quelques parties, si un jeu peut plaire au plus grand nombre. Et je peux l’affirmer haut et fort : Flip 7 a plu, chez moi et dans mon cercle ludique élargi, au plus grand nombre.
Le meilleur jeu ? Non, pas forcément ! Le plus remarquable ? Non plus ! Celui auquel mes visiteurs auront envie de rejouer. Là. Tout de suite. Maintenant. Et celui dont ils prendront la photo avant de quitter la table, prêt à l’ajouter dans le panier de leur boutique en ligne favorite.
Bon dans ce cas c’était pas de bol, Flip 7 est en rupture aux USA jusqu’à fin janvier. L’excitation d’avoir trouvé le remède aux tristes soirées d’hiver a vite laissé place à la déception de ne pouvoir se le procurer que dans quelques semaines.
Alors, non ! L’ajout au panier n’est pas la fumée blanche qui désignera un élu, bien sûr.
Flip 7 provoque simplement des réactions. Des réactions de satisfaction. Des cris étouffés. Des sauts sur notre chaise. Un bouillonnement permanent. On sait qu’il se passe quelque chose sur une table de Flip 7. De près. De loin. On le voit, on le sent.
Faites vos jeux
A l’instar du casino, le dealer se penche vers vous et vous invite à prendre une décision, un risque, un pari. En vous proposant une carte, il fait appel à votre raison tout en vous incitant à faire le choix déraisonnable, cherchant à vous faire succomber à l’envie. Parce que nous voulons toujours plus. Parce que 20 points c’est bien, mais 30 c’est mieux. Vous avez croisé le regard des joueurs assis de l’autre côté de la table, vous savez qu’ils pourront scorer plus dès le coup suivant. Le dealer nous engage à jouer. Il nous met au défi de battre les probabilités.
Le choix n’est pas stratégique, oh non. Il repose uniquement sur des probabilités de piocher une carte differente que celles placées devant nous. Le deck comporte 94 cartes. 79 cartes allant de 0 à 12 (12 cartes de valeur 12, 11 cartes de valeur, 10 cartes de valeur 10, etc… Sauf le 0 qui est répresenté 1 fois). Auxquelles s’ajoutent une quinzaine de cartes actions qui permettent de briser la monotonie d’un jeu trop lisse en pimentant notre tour de jeu. Des cartes pour scorer plus, ou pour interrompre la série d’un adversaire trop enthousiaste.
Voilà donc à quoi se résume le jeu : acceptez-vous la carte suivante, oui ou non. Du stop ou encore à l’état pur. A l’instar d’un Strike vous aurez peut-être perdu avant avoir eu même l’occasion de jouer. Parce qu’on ne contrôle rien… Enfin, pas grand-chose. Et pourtant, on s’en fout. On en redemande. On abandonne la raison pour s’adonner aux émotions les plus basiques. Les plus authentiques. les plus réjouissantes.
Réactions en chaine
Autour de mes tables j’ai pu surprendre des grand-mères taper des doigts sur la table comme le “check” des pros au poker, des voisins scander tour à tour “hit me!” (l’équivalent du “Carte !” au blackjack). Des enfants aussi, sûrs de leur chance, jonglant entre vanité, allégresse et regrets. Une table de Flip 7 vit, s’anime, baignée dans le tonnerre des grognements des victimes de la surenchère sans fin ou dans les éclats de surprises, au parfum de jackpot.
Mais encore plus, on s’intéresse à nos compagnons de jeu dans Flip 7. La comparaison avec Strike tient toujours : les yeux surplombant la piste de dés laissent place au pouvoir magnétique du dealer, maître de notre destin. Les mêmes regards qu’on retrouve dans les yeux de celui découvrant une destination toute faite aux Aventuriers du Rail. Ou dans ceux de mes nièces tombant sur un Trio ou un Skyjo dans les jeux du même nom.
Et ces réactions sont le dénominateur commun des jeux de ma ludothèque qui ont plu au plus grand nombre.
Flip 7, c’est bien. Très bien même. En jeu d’apéro à plus de 5 joueurs. Parce qu’en-dessous on perd une part de ces échanges, de ces réactions. Une part de son succès.