Après leur superbe réalisation qu'est Street Masters, nos valeureux auteurs, les frères Sadler, reviennent à la charge avec un Dungeon Crawler qui en a sous le capot et qui va faire frémir nos bras chétifs tant la boîte est remplie de matériel !
Altar Quest, c'est donc un nouveau Dungeon Crawler coopératif sans meneur de jeu. Certains joueurs se diront "Pff, encore un..." les fans du genre pousseront des hurlements hystériques.
Surtout qu'Altar Quest n'est pas n'importe quel Dungeon Crawler. C'est un DC qui utilise l'ingénieuse mécanique du Modular Deck System qui a fait ses preuves dans de précédentes réalisations comme Street Masters ou alors Brook City.
Mais alors, c'est quoi ce Modular Deck System ? Hein, c'est quoi, c'est quoi, c'est quoi ?
A cela, je répondrai : patience, jeune asticot. Commençons par parler du thème.
Vous savez, nous autres amateurs de Porte-Monstre-Trésor sommes habitués aux contextes clichés qui servent bon nombre de DC. Le guerrier, le magicien, le voleur et le prêtre. Eh bien dans Altar Quest, vous ne serez pas dépaysés parce que c'est pareil. Attention, lever du rideau et présentation des personnages !
Pour commencer, Sedrin Highmoor, prêtre humain de niveau 1 armé de sa masse lourde, arborant les couleurs de la paix et probablement d'alignement loyal bon. Se fera un plaisir de soigner ses alliés !
Ensuite, Rowen Lofflin, voleur hobbit court sur pattes, spécialisé dans le lancer de dague et la préparation de muffins au lait de chèvre.
Accueillons maintenant Quella, magicienne humaine qui a dû faire ses études à Poudlard puisqu'elle se métamorphose en la créature emblématique de Serdaigle. Un peu maigrichonne mais redoutable au combat grâce à ses sorts offensifs, comme tout magicien qui se respecte.
Et pour finir, Myreen Duvall, guerrière vampire se battant à l'épée longue et au bouclier. Maîtrise la charge ainsi que la protection des alliés, mais ne crache pas sur un verre de sang de temps à autre.
Ensemble, nos quatre héros vont défier les forces du MAAAAAAAL en affrontant grenouilles maléfiques, cochons bipèdes ainsi que des vampires (ça veut dire que Myreen Duvall se battra contre les siens !). En sortiront-ils vainqueurs ? Cela ne dépendra que de vous. Tan, tan, tannnnnnnnn !
Bon, vous l'aurez compris, mais niveau originalité, on aura vu mieux, même s'il est appréciable d'avoir une vampire parmi nos convives. Je reconnais aussi que je n'ai pas l'habitude de poutrer des grenouilles ainsi que les cousins de Pumba, mais il y a décidément un petit côté gentillet vu et archi déjà vu.
Mais ne nous inquiétons pas, la boîte de Strech Goals regorge de personnages alternatifs, tel qu'un elfe loup-garou. Je serais ravis de vous en citer d'autres, mais il faut dire que j'ai très peu étudié tout ce qui n'était pas issu de la boîte de base.
Avant de passer aux mécaniques de jeu, je souhaite toutefois complimenter le jeu sur un point. En effet, Altar Quest est l'un des rares DC ou jeux d'aventure dans lequel les aventuriers de type féminin ne partent pas à l'aventure vêtus d'un string ou d'une armure avec ouverture sur la poitrine. L'armure de notre guerrière vampire lui recouvre intégralement le corps. Quant à la magicienne, ses habits sont... comment dit-on, déjà... ah oui, normaux !
Blacklist Games, je te remercie pour ça !
Mais bref, passons maintenant en revue la façon de jouer.
Dans Altar Quest, vous jouez un aventurier ou une aventurière. Vous vous frayez un passage à travers les salles à coups d'acier et de magie. Votre but ? Cela dépendra de la quête que vous aurez choisie. Peut-être devrez-vous libérer un prisonnier, ou alors fuir le donjon, voire encore vaincre le puissant boss qui terrorise la région !
Votre objectif sera classique. En revanche, la façon de jouer le sera moins.
Je disais plus haut qu'Altar Quest utilise la mécanique des decks modulables. Ca veut dire quoi ? Tout simplemement qu'avant de débuter une mission, il vous faudra choisir :
- Une faction ennemie
- Un boss
- Une quête
La faction ennemie représente les adversaires que vous rencontrez de salles en salles, soit des grenouilles, des cochons ou des vampires si vous utilisez la boîte de base.
Le boss représente votre ennemi le plus puissant, celui qui, allez savoir pourquoi, se terre dans les pronfondeurs et ne surgira qu'à la fin de l'aventure pour en découdre avec vous. La boîte de base nous propose, comme boss, une grenouille géante, une cochonne... ou disons plutôt une truie guerrière, et une vampire alétant sons petit. Pas besoin de chercher loin pour réaliser que chacun de ces boss possède une corrélation avec l'une des factions.
La quête définit votre objectif, votre mission, et d'éventuelles conditions de défaite autre que la mort.
Tout ce contenu, vous êtes libre de le mélanger à loisir. Vous souhaitez effectuer la quête "Recherche" en vous opposant aux terribles cochons avec la maman vampire à leur tête ? C'est tout à fait possible. Vous préférez assurer une certaine cohérence en affrontant les grenouilles ainsi que le boss grenouille ? C'est tout aussi bien.
Vous vous retrouvez donc avec pas mal de combinaisons possibles puisqu'il y a 3 factions, 3 boss et 7 quêtes (je crois que c'est 7). Ajoutez à cela la variété des personnages. On a fait pire en terme de rejouabilité.
Mais il y a encore quelque chose à savoir. Dans ce système de deck modulables, chaque personnage possède son deck de cartes. Ces dernières représentent les capacités offensives, défensives et utilitaire de votre héros. Et chaque deck est unique : ne vous attendez pas à retrouver les mêmes pouvoirs d'un héros à l'autre.
Ces cartes ne sont cependant pas l'unique arsenal de votre personnage : vous aurez aussi une capacité permanente ainsi qu'une ou deux pièces d'équipement personnel. Autant dire que vous êtes paré !
C'est donc en usant d'actions régulières et de cartes de votre deck que vous progresserez dans les demeures du mal. Vous lancerez des dés pour attaquer, mais aussi pour vous défendre. La plupart des faces représentent des succès, mais d'autres vous permettent de gagner ou d'utiliser du focus, transformant vos tentatives en véritables exploits.
Votre personnage possède les six caractéristiques habituelles : Force, Dextérité, Constitution, Intelligence, Sagesse et Charisme. Chacune de vos attaques est basée sur une de vos caractéristiques. Plus vous aurez de point dedans, plus vous lancerez de dés et infligerez de dégâts.
Pour la défense, c'est pareil : chaque attaque ennemie se confronte à une de vos caractéristiques. Là aussi, mieux vaut qu'ils ne jouent pas sur vos points faibles. Plus vous aurez de dés grâce à votre caractéristique, meilleures seront vos chances d'en ressortir indemne. Si cela ne suffit pas, vous subirez des blessures, et si vos points de vie devaient atteindre le seuil fatidique de zéro, il n'y aura ni "mais" ou autre, ça sera la défaite immédiate, nah !
Il est aussi agréable de constater qu'Altar Quest apporte une certaine subtilité grâce à sa mécanique des Altars (d'où son nom).
Vous vous rappelez de Mage Knight ? Il y a en quelque sorte de la magie qui flotte dans l'air, vous permettant d'exploiter vos pouvoirs au summum de leur puissance. Dans Altar Quest, nous retrouvons cette idée car les donjons que l'on explore abritent des Altars, pierres magiques dégageant une mystérieuse énergie. Pour déterminer quelle magie ces Altars dégagent, nous avons des dés personnalisés indiquant des éléments. Chacune (je dis bien chacune) de nos actions peuvent être améliorées grâce à la magie des Altars, du moment que l'élément nécessaire est disponible.
Et ce qui est bien foutu, c'est que les ennemis aussi peuvent utiliser ces éléments. Parfois, vous chercherez même à dissiper cette magie juste pour qu'ils ne l'exploitent pas. De belles perspectives pour la tactique et la stratégie.
Bon, je pense avoir dit l'essentiel concernant la mécanique. Maitenant, il faut savoir que le jeu peut-être joué de trois façons : mission one-shot, campagne non narrative et mode histoire (comme une campagne mais avec... une histoire).
Jouer en campagne vous permettra d'améliorer votre aventurier de partie en partie, que cela soit en achetant de l'équipement ou en acquérant de meilleures cartes. Mais attention, car vos ennemis aussi gagneront en puissance. Un mode de jeu prometteur en somme mais que je n'ai pas essayé.
Et pour ce qui est du nombre de joueurs ? Altar Quest peut se jouer de 1 à 4. Et là, j'ai une bonne nouvelle pour les adeptes du solo, car il est possible de jouer un seul personnage partant tout seul à l'aventure, le jeu s'adaptant automatiquement au nombre de héros. L'ennui, c'est que vous ne profiterez pas des habituelles synérgies entre différentes classes, mais ça a le mérite d'être accessible et plaisant. Vous pouvez tout de même jouer deux personnages en solo, mais sachez que cela nécessite un peu d'organisation, car chaque personnage possède son deck de cartes, rappelons-le.
Maintenant, la question que vous vous posez sûrement : pourquoi un 7 alors que ça en jette sur le papier ?
Parce qu'Altar Quest est un bon jeu. Voilà tout.
Oui, vous avez bien lu, j'ai dit que c'est un bon jeu. Mais c'est peut-être justement le problème : il n'est malheureusement pour moi pas un TRES bon jeu.
Altar Quest souffre de règles pas très bien rédigées et manquant parfois de clareté : on passe un temps fou à chercher, des fois en vain, les détails qui nous manquent. Et ça casse le rythme du jeu, alors qu'il s'agit déjà d'un problème.
Oui, parlons effectivement du rythme. C'est comme qui dirait un peu lent. Vous vous souvenez de Gloomhaven ? On passe des plombes à effectuer notre tour avec toutes ces cartes et leurs capacités. Ben dans Altar Quest, les tours demandent du temps aussi, sauf que contrairement à dans Gloomhaven, on ne choisit pas ses cartes en même temps.
En sachant que dans Altar Quest, une fois que l'on a effectué ses trois actions, il faut :
1) Attendre que les autres joueurs aient effectué leurs trois actions.
2) Activer tous les monstres en jeu.
3) Effectuer la phase d'évènements du boss.
4) Activer toutes les cartes de quête.
Pfiou, ça en fait du temps. En solo et en duo, cela peut encore passer, mais imaginez à trois ou à quatre ! Pire, imaginez cela à trois et à quatre AVEC les temps-morts pour chercher un point de règle. Oui, il vous faudra être patient.
Bref, nous disions donc qu'Altar Quest souffrait de lenteur. C'est encore plus regrettable qu'il souffre aussi de lourdeur.
Par lourdeur, j'entends qu'il y a tellement de bazar sur la table, entre le plateau gigantesque, les différents paquets de cartes entreposés, les zones des joueurs où sont placés les ennemis et les cartes relatives aux personnages, les six piles de jetons, les cartes de quête qui ne cessent d'être ajoutées... Oui, au bout d'un moment, ça fait trop.
Vous savez, ce n'est pas parce qu'un jeu regorge de matériel qu'il est forcément démesurément encombrant, non. Le plus souvent parce qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser tout le matériel à chaque partie. Ce n'est pas le cas non plus dans Altar Quest mais il y a tout de même beaucoup, beaucoup de choses. En solo (mais pas que), vous risquez de vous sentir un peu submergé, même si comme moi vous avez l'habitude de jouer à vos jeux seul.
Je dirais donc que les premières parties seront difficiles : votre table n'aura plus la place d'accueillir le moindre objet et les recherches régulières dans les règles interrompront la moindre de vos séquences de jeu.
Encore un petit point négatif ? J'ajouterais que les ennemis manquent de variété. Sauf exception, tous vous attaquent de la même façon, si ce n'est que la caractéristique de défense chanque de l'un à l'autre. Bon, on remarque que certains attaquent au corps à corps et d'autres à distance, mais cela ne suffit pas à éponger le problème.
Si comme moi vous aviez l'habitude des ennemis uniques de Street Masters, vous risquez d'être un peu déçu.
Mais à part ça, que reste-t-il ?
Disons-le franchement : il reste un jeu extrêmement bien abouti, regorgeant de bonnes idées, avec du matériel de qualité et des heures de plaisir. Vous aurez vraiment à faire avec ce gros jeu tant les subtilités sont nombreuses, ajouté à cela une boîte au ventre bien rempli.
En fait, s'il n'y avait pas les soucis énoncés plus haut, ce jeu mériterait facilement un 8 ou un 9 à mes yeux. On voit donc qu'il n'est pas à jeter, bien au contraire.
Il faut donc vous poser la question : surmonterez-vous le rythme lent du jeu et sa lourdeur ?
Si vous pensez être en mesure de relever le défi, sachez que le jeu bénéficiera probablement d'un nouveau Kickstarter un jour, à moins que vous ne commandiez votre exemplaire directement sur le site de l'éditeur.
Sinon, vous passerez à côté d'un bon Dungeon Crawler, mais ce n'est pas bien grave car il est loin d'être le seul.