En comparant Caylus 1289 et Caylus 1303, j'ai songé à cette querelle récente au sujet des chiffres romains dans certains musées : Au lieu d'enseigner des éléments de connaissances, on préfère maintenant les simplifier (quand c'est pas les supprimer) pour que tout soit à la portée "du plus grand nombre".
Alors à quand un Res Publica Romana roll and write ou un Antiquity dice ? Et oui, je vous le répète, il faut sim-pli-fier ! Le nivellement par le bas au nom de l'égalité, d'une pseudo-modernité ou de la "fluidité", le nouveau mot d'ordre chez certains éditeurs aujourd'hui.
ça va ! ne vous fâchez pas... :-) Cooool ! C'est juste une petite "intro-provoc" pour attirer votre attention et je grossis le trait volontairement ; Il faut parfois faire ressortir les choses plus que nécessaire afin de les rendre visibles par le plus grand nombre. Oh zut ! Vous voyez, même moi je cède à cette mode.
Alors passons rapidement sur les illustrations assez tartignoles (non, là j'exagère pas et je le pense vraiment), parlons des mécanismes... enfin, de ce qu'il en reste.
Caylus 1303 nous débarrasse de diverses scories qui polluaient Caylus 1289 :
- L'argent tout d'abord. C'est pénible de devoir gérer un peu d'argent ! Et puis ces piécettes au tintement clair quand on les manipulait, je me souviens que ça énervait les tables de jeu d'à coté. Remarquez, c'est un signe des temps hein, il faut toujours diminuer encore plus le "coût" du travail, alors à Caylus, on a trouvé la solution, on paye plus les ouvriers. Enfin, c'était un soucis pour les joueurs que d'être obligé d'aller au Comptoir ou bien de quémander quelques deniers à Philippe le Bel. D'ailleurs à ce sujet...
- Les faveurs du rois : Vous vous souvenez pas ? La prise de tête que c'était ! Mais si ma bonne Dame, c'était bien trop compliqué avant ces 4 lignes qui obligeaient les joueurs à faire des choix stratégiques au moment des faveurs. Aller, un truc linéaire (avec des récompenses simples) pour tout le monde et on en parle plus. Il y avait deux choses de pénibles à Caylus : les adversaires et les choix trop nombreux. Et bien là, on a diminuer les possibilités de choisir, comme pour la suppression de l'argent, ça donne plus de "fluidité "paraît-il. Manquerait plus qu'on en fasse un coop maintenant...
- Le (pauvre) Bailli :
- "Bonjour. Je me présente pour le casting de Caylus 1303, c'est moi qui tenait le rôle du Bailli dans la version précédente. J'ai de l'expérience et sans vouloir me vanter, j'avais un rôle important..."
- "Ah ! Oui... c'est vrai. Alors heu...comment vous dire ? En fait, comme il y a maintenant un nombre de tour fixe, le rôle n'est plus attribué. Et puis surtout, le Prévôt est à cheval à présent... vous montez pas à cheval vous ?[...] Et bien vous soyez, c'est donc plus possible, désolé hein..."
Oui, ça aussi, l'incertitude du nombre de tours, c'était un truc qui angoissait trop les joueurs, alors qu'avec un nombre de tour fixe au moins, on est plus rassuré, on peut mieux peaufiner une stratégie qui consiste essentiellement à envoyer des ressources au château déjà construit.
Car il est déjà construit, mais il faut - encore – le renforcer à cause des méchants "goddons" qui sont en Guyenne, à coté quoi et sait-on jamais, ils seraient peut-être tentés plus tard de nous faire une guerre qui pourrait durer cent ans au moins, allez savoir...
Avec Caylus 1289, les voies du succès passent par des chemins variés, une richesse stratégique que ne je retrouve pas dans le Caylus 1303, pour des raisons déjà évoquées, mais je n'ai pas encore parlé des bâtiments. Globalement, cela rapporte moins de points que de se lancer dans la construction, tout est orienté vers l'envoi des lots de ressources au chantier. Les bâtiments (bleus) de prestige ? Ils représentent 122 points potentiels dans le Caylus 1289, pour 70 points seulement dans le Caylus 1303. Les bâtiments (gris) en pierre ? 48 points dans le Caylus 1289, 37 points dans le Caylus 1303 et j'ajouterais que dans ce dernier, les résidences ne rapportent pas de points (2 points par résidence dans le Caylus 1289). Et je passe sur d'autres détails.
Autant autrefois on pouvait tenter un service minimum concernant le château (enfin, il fallait quand même un peu s'y coller au moins pour pas être puni par le roi et obtenir quelques faveurs) et se concentrer sur d'autres aspect du jeu, autant on a pu constater, au fil de nos parties de Caylus 1303, que les grosses livraisons étaient clairement le meilleur moyen de bien figurer dans le jeu, sans trop s'inquiéter des bâtiments. On vous demande en réalité d'inventer la première grand plateforme de livraison. Et puis n'existe plus de restriction ou de sanction au manquement, c'est open-bar quoi...
Il y a toutefois un ajout qui m'a séduit, c'est celui des personnages dont le fonctionnement et la circulation fait beaucoup penser au système de Rattus. J'aime bien cette mécanique et pour tout dire, c'est ce que j'ai préféré dans ce nouveau jeu... heu.. Caylus, pardon. A souligner aussi le fait qu'ils ne seront pas tous présents à chaque partie, ce qui apporte une variété intéressante. De même, la mise en place de départ est un point plutôt positif, mais cela ne compense pas ce qui me manque dans cette version.
Des petits taquins pourraient me dire "Ouai, mais il est dans ta ludo ce Caylus 1303 et puis tu avais raconté que tu le trouvais pas mal, et blablabla..." Alors en effet, lors des premières parties, j'étais plutôt satisfait, mais c'est après que cela s'est gâté, d'abord pour cette histoire de livraisons un peu trop souvent victorieuses et surtout qu'une partie de Caylus, "le Grand", jouée il y a quelques temps, m'a rappelé combien sa richesse n'empêchait pas la "fluidité" , que rien ne le "ringardisait" et qu'il était quand même d'une taille bien au-dessus...
A la limite, Caylus 1303 est un bon marchepied pour des joueurs moins habitués avant d'aborder "le Vrai" Caylus, ou bien encore si on manque de temps, si on est un peu fatigué, si on a que lui sous la main... non, là je blague. Evidemment, nous n'avons pas là un mauvais jeu, loin de moi cette idée mais vous l'aurez compris, je suis déçu par ce "nettoyage" qui selon moi ne s'imposait pas.