Mais que ce Earth nous a déçu… Victimes de l’engouement, sans aucun doute.
Je me vois encore lire les premiers avis sur le jeu : faut-il crier au génie ? Ou bien déplorer un jeu trop permissif ?
Earth est présenté comme un jeu de construction de moteur. Sérieusement ? Non. Earth est un jeu de moteur, mais pas un jeu de construction de moteur. Earth fonctionne tout seul, peu importe ce que vous faites, les effets s’enchaînent. Vous disposez en outre dès le départ d’actions de base très auto-suffisantes durant toute la partie. Donc, oui, vous posez des cartes devant vous, mais ce n’est pas pour autant que vous avez la sensation de construire quelque chose. En fait, pour faire simple, vous ne construisez aucun moteur, vous ne faites que le huiler. Et ça… Bon… Bref… Earth n’est pas un jeu de construction de moteur.
Ca combote à tout-va. Mais je n’ai jamais eu le petit gilli dans le ventre. Ben non, puisque le jeu fait tout pour moi. Et quand ça s’en rapproche un peu, vous redescendez de votre émoi, parce que le hasard de la pioche a été en votre faveur.
Dans la même veine que dit précédemment, le jeu est par conséquent extrêmement permissif. Vous n’êtes jamais bloqués. Donc vous n’aurez jamais vraiment de sensation de frustration. Mais bon, là encore, à quoi bon jouer si vous ne faites que regarder un jeu jouer tout seul (attention, je ne dis pas qu’on joue seul, je dis bien que le jeu lui-même joue tout seul).
Ha oui quand même : si, si, et re si, on joue tout seul dans son coin. Cela ne m’a jamais gêné de jouer seul dans mon coin, mais là, j’ai atteint une limite autistique. A partir du moment où le seul lien avec les joueurs de la table consiste à de temps en temps vérifier la course aux objectifs. C’est en général à ce moment précis que vous vous dites « Ha ! Mais oui ! Je ne suis pas seul à la table ».
Earth n’est en fait qu’un jeu de lecture d’objectifs, en ce qui me concerne. La paralysis analysis n’est frôlée qu’à partir du moment où vous essayez en effet de croiser un maximum d’objectifs entre eux. Parfois c’est faisable. Parfois pas. Ça part dans tous les sens. Ca tombe mal pour vous, ça vous saoule, alors vous décidez d’expédier la partie en plantant rapidement votre tableau de 4x4 cartes, sans trop vous poser de questions. Ca donne un petit coup de chaud à vos adversaires. La partie se clôture. Et vous (ho, surprise), vous remportez la partie, sans en être satisfait. Ca m’est arrivé à ma dernière partie. Pas fou.
Je ne parlerai pas du thème (ben du coup, si) qui me passe complètement au-dessus de la tête (pourtant, c’est ce qui me bottait le plus, a priori). Ça n’a aucun sens. Les interactions potentielles au sein de tel ou tel écosystème posent franchement question (une toundra en Jamaïque, ou encore un plant de tomate en Antarctique). Et puis, on « ne construit pas » une île. Bref, je passe ce point. Tout cela ne me gênerait pas si l’éditeur/auteur n’insistait pas autant sur le lien qu’il y a entre la richesse de contenu de son jeu, la mécanique et le thème.
Le matériel est très soigné. Je m’interroge juste sur la tenue/édition du jeu si l’éditeur avait décidé de ne pas se baser sur ces jolis petits pions en bois… Mais bon, le matos ne fait pas tout.
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Voilà, j’ai hésité à écrire un avis comme celui-là. Je ne dirai jamais qu’un jeu est vraiment mauvais, ne fut-ce que par respect pour le travail qu’il y a derrière. Alors, oui, c’est un avis subjectif (excusez le pléonasme), mais franchement, par rapport à tous les autres jeux de gestion/construction de moteur (de Terraforming Mars à Res Arcana, en passant par Wingspan, et j’en passe, bien évidemment) auxquels j’ai pu jouer et auxquels je joue et rejoue très régulièrement, je me dis que Earth est juste une perte de temps. Alors, oui, laissez vous tenter par l‘attrait de la nouveauté. Mais surtout, interrogez-vous sur l’impact que l’engouement d’un jeu peut avoir sur vos choix. Moi, personnellement, je me sens un peu vexé d’avoir succombé.