Alors qu'ils se lancent aujourd'hui dans une sorte de Magic (Etherstone) on peut revenir sur les collaborations passées des deux Italiens les plus géniaux de l'euro game design, Luciani et Gigli. Après avoir joué à Golem, il est également intéressant de revenir à son modèle assumé, ce Grand Austria Hotel presque familial autant par son thème et ses dessins colorés que par la simplicité de ses règles, là où Golem se veut ésotérique, austère, rude... tout en se basant sur le même principe d'actions à valeurs variables.
En comparaison, GHA fait vraiment très "bébé": on passe son temps à nourrir des clients avec 4 sortes d'aliments avant d'aller les border dans leur chambre quand ils sont repus. Mais tout comme les combos de cartes subtils de Lorenzo et l'éloignement punitif des Golems incontrôlables, GHA a lui aussi son aspect un peu "dur", il réside dans l'impossibilité totale d'enlever les clients de votre restaurant: ils y resteront cloués jusqu'à obtenir satisfaction, alors choisissez-les bien! Si vous choisissez mal un hôte, cela va avoir des conséquences assez désastreuses et durables !!!
Par contre, l'aspect le plus fun de ce jeu très "good vibes", c'est son choix d'action dont la puissance est déterminée par un lancer de nombreux dés. C'est ce système qui a été repris dans Golem, où les billes de couleur y ont ajouté une couche de complexité ici totalement absente. Lorsque les joueurs se mettent à passer/rejouer les dés, on se demande si on est bien dans un euro expert ou dans un stop ou encore assez léger à la can't stop.
Car s'il est vrai que le hasard est omniprésent dans ce jeu (et pas seulement dans son lancer de dés) on peut considérablement le réduire ou le maîtriser en planifiant ses actions, d'autant que tout est vraiment clair et lisible. La piste de l'empereur, avec ses "excommunications", rappelle quant à elle directement Lorenzo. Il n'est vraiment pas difficile de progresser dessus mais avec seulement deux coups par manche il faudra juste ne pas oublier de le faire pour ne pas se retrouver à zéro au moment des fatidiques décomptes impériaux.
Au final, c'est un jeu vraiment sympa, qui me fait d'avantage penser à une course qu'à une construction de moteur. C'est l'anti-Lorenzo/Master of Renaissance: adieux les noeuds dans le cerveau pour obtenir des tours de malade qui combotent, ici c'est le règne de la petite gratification permanente -même si, encore une fois, il est possible de se mettre dans de sacrées ornières si on ne planifie absolument rien. Cette épure est très bienvenue et prouve que ces auteurs aiment tous les types de jeux, mais je trouve néanmoins GAH nettement derrière Newton, un jeu également très épuré qui reste à mon avis le plus "élégant" auquel ait collaboré Simone Luciani (c'est étrange d'ailleurs car il est souvent classé dans les moins intéressants).