Nombre de partie 'en réel' : 0
Nombre de partie en ligne (BoardGameArena) : Environ 450
Lorsqu'on demande des jeux abstraits aux règles simples mais avec une grande profondeur, je vois souvent cités les jeux du projet Gipf. Pour le peu que j'en connaisse (quelques partie de Dvonn et Tsaar), ce sont effectivement d'excellent jeux, qui répondent parfaitement à ce cahier des charges. MAIS pour moi, Gygès est encore un cran au dessus. Oui, on atteint un sacré niveau à ce stade, il fallait bien que le titre soit en conséquence !
Un jeu abstrait où les pièces n'appartiennent à aucun camp, mais où il existe quand même une spatialité 'nord contre sud', avec un espace propre à chaque joueur à défendre, ce n'est pas fréquent (je n'ose pas dire unique de peur de me tromper mais l'idée est là).
La force de Gygès, c'est sa simplicité de lecture. Le plateau de 36 cases avec seulement 12 pièces reste à une dimension modeste, qui permet d'avoir une vision globale du jeu assez facilement. Le jeu est donc à mon sens possible a appréhender sans nécessaire faire fumer l'ensemble des ses neurones juste pour comprendre quoi faire concrètement.
Cependant, cette apparente simplicité rassurante au démarrage ne limite absolument pas la profondeur du jeu. La façon de créer son réseau, les équilibres à trouver entre l'attaque et la défense, la gestion dans les différents types de pièce qu'on garde a disposition, le fait de pouvoir replacer les pièges n'importe ou sur le plateau donne un résultat pharamineux en termes de stratégie.
Les premières parties seront déjà l'occasion de se familiariser avec l'aspect réseau du jeu, et d'acquérir une bonne vision des déplacements multiples en rebond sur le plateau. A ce stade de démarrage du jeu, le joueur devra surtout être attentif et prendre des réflexes de lectures du plateau.
Puis, assez rapidement, une fois cette étape assimilée, on prendra plaisir à commencer à comprendre le jeu, à mettre la pression à l'adversaire jusqu'au moment ou celui-ci se retrouvera dans l'impasse sans possibilité de se défendre, à anticiper des attaques implacables et à les planifier plutôt que de les constater a posteriori.
A ce stade, on pourra dire qu'on sera prêt à jouer véritablement à Gygès, et on démarrera le long chemin de la compréhension des concepts qui régissent la stratégie de ce jeu (création de réseau asymétriques, blocage des mouvements adverses, gestions des pièces).
Un autre point intéressant, c'est cette dynamique de victoire 'en un coup'. Ici, pas d'accumulation de points, on trouve un mode de victoire semblable aux échecs, avec une condition spécifique de fin de partie et un résultat indépendant du reste du plateau. Ce système permet de nombreux renversements de situations, et ce même une fois le jeu 'maîtrisé' (comprendre, avec deux joueurs d'un bon niveau). Une situation qui semblait avantageuse pourra brusquement se révéler délicate sur une attaque ratée, et l'initiative change rapidement de camp.
La conséquence, c'est que les parties peuvent à la fois être longue et disputée, riche en rebondissement (hahaha quel calembour, le rebond dans gygès...), mais aussi de façon surprenante incroyablement rapide. La physionomie du jeu fait qu'on peut très rapidement se retrouver en danger, et perdre parfois en une dizaine de coup seulement. Les phases "d'ouverture" ne sont pas longue, et la bataille fera rage rapidement sur le plateau.
Bien sûr, comme tout jeu abstrait de ce type, une expérience du jeu optimale nécessitera d'avoir des adversaires (enfin, au moins un) régulier avec un niveau proche, pour apprécier les parties au maximum. Ici, impossible d'attribuer un nombre de points de handicap qui comblerait l'écart de niveau entre deux joueurs.
Je ne me prononcerai pas au niveau du matériel du jeu, n'ayant joué qu'en ligne et ayant cru comprendre que plusieurs versions avaient pu voir le jour au fil des années. Cependant, pour reprendre la comparaison initiale avec les jeux du projets Gipf, ces derniers me semblent sur ce point esthétiquement largement au dessus.
Pour le reste, je ne peux que vous conseiller d'essayer Gygès. En fan de jeux abstraits, il reste, pour l'instant et pour moi, le meilleur !