*Justinien* fait partie de ces nombreux jeux de Colovini pleins d'idées originales et de mécanismes élégants, mais dans lesquels le hasard est tel qu'on se demande au final si on a affaire à un jeu de réflexion qui donne l'impression d'être un gros jeu de moule©, où à l'inverse.
Ici, on a effectivement droit à pas mal de bonnes idées: les permutations des conseillers, le bluff dans les déplacements et les enchères, un système de décompte astucieux... Et si du point de vue du thème on se sent bien loin des vicissitudes des intrigues de cour, le matériel est quant à lui irréprochable, austère mais soigné, dans l’esprit des iconostases orthodoxes.
Comme souvent avec Colovini, on se dit qu'il faut plusieurs parties pour dompter la bête. Que le chaos apparent peut-être apprivoisé, pour peu qu'on s'en donne les moyens, en pratiquant un jeu ouvert, grâce auquel on pourra se sortir de toutes les situations. Mais de mon côté, après trois parties, je ne suis toujours pas convaincu. Hasard des cartes, des tirages de tuile, imprévisibilité totale des couleurs de décompte choisies et des alliances de circonstance: bref, l'ensemble m’a paru relativement chaotique, ou en tout cas trop court pour qu'on puisse espérer faire basculer une tendance défavorable avec un nombre d'actions aussi limité. Si certaines créations de cet auteur m’ont franchement conquis, d’autres m’ont franchement déçu, et ce jeu là en fait partie.