Avec Shadows of Brimstone, c'est un énième jeu d'exploration qui se profile avec des figurines à peindre, des tuiles à profusion, des pouvoirs à ne plus en pouvoir, des tokens comme s'il en pleuvait et la nécessité d'avoir une table de 18m² pour y caser tout ce matériel dont on ne pourra cependant bouder la qualité.
SoB, pour le nommer plus facilement, c'est la promesse de jouer à Deadlands sur un plateau, avec des cowboys, des pseudopodes visqueux, des morts-vivants, de la roche fantôme, des crinolines, des stetson et des tonnes de munitions pour bouter le mal hors des mines d'un far west alternatif.
La mécanique est sympathique, voire même novatrice sur certains points, et reflète bien le statut de héros des personnages incarnés, des héros confrontés cependant à des puissances au moins aussi maléfiques que mortelles, et ça, ça fait plaisir : exit le gobelin qu'on lamine sans même y penser, ici, il faut se préserver car l'ennemi n'arrive jamais autrement qu'en horde et même votre bonne vieille winchester ne vous protégera pas longtemps face à des vagues parfois incessantes de zombies vomies par un tas de cadavres hors d'atteinte.
L'avancée des personnages se fait donc "à l'aveugle", il n'existe pas de carte prédéfinie pour les donjons (enfin des mines, mais permettez-moi d'user de termes génériques) que vous explorerez, les tuiles se posant de manière aléatoire mais malgrè tout encadré. Il n'est pas rare de s'enfoncer dans des salles de plus en plus profondes et de négliger une dizaine de passages pour parvenir à ses fins...
Si le système est original, il est également très chaotique et a parfois tendance à prolonger les parties inutilement en ajoutant des couloirs qu'on ne peut explorer et qui entraînent la pose d'une nouvelle tuile, puis d'une autre tuile et encore une autre, ad nauseam...
Autre problème, les personnages ont des différences de déplacement parfois énormes, il nous est souvent arrivé de devoir attendre l'un de nos personnages pour poursuivre l'exploration sans mettre le groupe en danger.
Autre système original, chaque salle réserve son lot de surprises lorsqu'on l'explore via un deck de cartes "événements" qui vont du cadeau plaisant au piège franchement sadique. Ne cherchez pas de logique cependant, une bonne dose d'imagination sera parfois nécessaire pour apporter du crédit à ce qui vous tombera dessus.
Les rencontres sont pour moi le gros point noir du jeu. Vous vous retrouverez en effet souvent submergés par des ennemis aux capacités parfois ravageuses. Là n'est pas le souci, après tout, nous jouons des héros et il est logique qu'on ne nous livre pas une simple chair à canon pour nous ralentir, après tout, n'oublions l'échelle de menace symbolisant le Mal ancien qui remonte des profondeurs de la terre pour envahir le monde de la surface (oui oui, c'est le pourquoi du comment vous allez vous retrouver dans des donjons). Non, le problème c'est la longueur de la chose, même une fois le système maîtrisé.
Si je ne rechigne pas à transformer les monstres en passoire à coups de carabine, à les carboniser par le biais d'imprécations latines ou simplement à les larder de coups de tomahawk, je peine bien plus à me dire que cette suite de combats à quelque chose d'inutile qui ne sert en rien le côté scénarisé qu'on peut attendre de ce type de jeu...
Ajoutons à cela la possibilité d'explorer d'autres mondes par l'entremise de portails qui peuvent apparaître (non sans vous avoir au préalable craché au visage une nuée de créatures plus ou moins antipathiques) et vous obtenez un jeu rempli d'action mais soumis à une langueur qui anéantira votre envie de jouer à force d'être confrontés à des situations toujours semblables qui transformeront vos synapses en un amas globuleux fleurant bon la gelée de framboise.
Il reste à noter que le système des villes (les étapes hors-donjon) sont en revanche une trouvaille des plus éclairées, permettant à chacun de vivre de petites aventures, d'effectuer des transactions, de se soigner ou de se débarrasser d'une corruption étrange ("dis donc, c'est quoi ce portail magique dans ton ventre là???") au risque de faire des rencontres parfois déplaisantes.
Un système bien plus riche que le simple tirage de cartes qu'on pouvait trouver par exemple dans Descent.
Dernière remarque, pourquoi avoir fait deux boîtes au contenu quasi-similaires? Pour vivre la totalité de l'aventure, faut-il donc se ruiner et se réjouir d'avoir 75% du matériel en double exemplaire?
Au final, vous direz que je chipote, parce qu'il y a plein de bons points pour cet ameritrash qui sent bon la conserve de haricots rouges réchauffée au feu de bois, il n'empêche que je lui préfère un bon vieux Descent pour lequel vous aurez au préalable écrit une belle campagne...
Sans le stetson, ça c'est dommage, j'avoue...