David Turzci n'est pas italien mais en jouant à Tawantinsuyu on en a un peu l'impression, tellement il colle à cette vague d'euro games à la fois complexes et épurés venant depuis quelques années de ce pays.
En lisant son titre et en essayant de le répéter, vous aurez déjà une petite idée de la difficulté que va présenter la première lecture des règles. Par contre, une fois rentré dedans, tout sera parfaitement fluide pour vous, un peu comme quand on a appris une nouvelle langue. Personnellement, bien comprendre tout le jeu sans qu'il ne me reste la moindre doute m'a pris 3 bonnes heures! Une vidéo explicative ne sera pas forcément utile, car la règle est vraiment super claire et la logique interne du jeu finit par s'imposer sans nécessité de revenir vérifier tout le temps. Cependant, il y a bien quelques petites mini règles pas hyper claire, en particulier la phase du setup est très active (on peut déjà construire des bâtiments) et la notice passe dessus beaucoup trop vite. Pareil pour l'action de réactivation, qui stipule simplement de retourner des tuiles bâtiments ou des cartes dieu. Si je ne connaissais pas cette action dans Newton ou d'autres jeux similaires, je n'aurais pas du tout compris qu'il s'agissait juste de révéler de nouvelles cartes du marché si le choix est trop ingrat.
C'est bien beau d'avoir appris les règles, mais pour les joueurs à qui vous devrez enseigner, ce sera à nouveau un parcours du combattant, à tel point que je me demande si ce type de jeu ne serait pas optimum pour seulement 2 joueurs, d'autant que la partie spatiale (positionnement des meeples sur la pyramide) se joue bien à deux: d'abord elle n'a pas grand chose à voir avec les jeux de placement/majorité (si fades dans cette configuration) mais aussi des meeples "morts" sont posés en début et en cours de partie pour réduire les choix.
Il y a bien un décompte majorité, mais il est exclusif à l'action guerre et se joue sur les tableaux dans les coins. Pour le reste, on est dans de la création de moteur et gestion de ressources classique mais extrêmement ouverte, une sorte d'apogée du genre à mon avis (mais je ne connais pas assez de jeux complexes pour en juger). Je pensais que Golem était le plus "bac à sable" des jeux de ce genre, mais j'ai bien l'impression que celui-ci est encore plus libre. Bien sûr, cette liberté ne garantit pas l'obtention de PV, mais au moins vous avez toujours beaucoup de choix possibles, et les gratifications diverses sont quand même très fréquentes (surtout en nourriture, vu qu'il s'agit des ressources les moins précieuses). Un aspect vraiment plaisant, c'est que les "manches" se terminent selon la façon dont les joueurs ont joué (le nombre de guerres ou de meeples pris au village). Un autre aspect sympa qui rappelle Puerto Rico ou Calimala, c'est que vos actions impliquent souvent les autres joueurs, mais avec moins de récompenses. Il faudra donc toujours espionner ce que telle action leur apporterait si vous la déclenchiez. Et comme les manches semblent potentiellement infinies tant que vous ne dépensez pas les meeples du village, vous pouvez vous dire qu'un petit déclenchement qui ne sert qu'à vous, même s'il ne rapporte pas grand chose, est TOTALEMENT gratuit (le temps n'est même pas perdu). Quand je vous parlais de liberté...
Je ne vais pas me lancer dans l'explication du jeu, mais grosso modo sachez que tout part d'un grand prêtre, installé au sommet d'une pyramide constituée par 4 Pentagones enchâssés. Vous déployez vos meeples à partir de lui car c'est moins cher (le changement de côté des pentagones et les étages nécessitent des ressources). Grâce à ces meeples vous déclenchez bien sûr toutes sortes d'actions.
En plus de cette action de pose d'ouvrier classique (pimpée par un power up de chaînage de meeples de même type, c'est à dire pas forcément les vôtres) on a plein d'actions "secondaires" qui s'avèrent ultra importantes pour parvenir à vos fins, selon la tactique que vous choisirez -c'est aussi là que réside l'immense liberté du jeu.
En rendant visiblement hommage aux jeux italiens de Gigli, Luciani, Mangione, Tascini ou même Lupiano, David Turzci en a réalisé un faux plus vrai que nature, dont l'éxubérance du nombre d'actions possibles est tempéré et rendue digeste par la logique absolue de ses mécanismes. Impossible de ne pas dire "c'est simple en fait!" aux joueurs à qui vous l'enseignerez, et bien sûr ils se moqueront de vous, avant de reconnaître deux heures plus tard que... bah, oui, vous aviez raison!
EDIT: j'ai acquis l'extension Golden Age, non traduite en français mais ce n'est pas grave car aucun texte non plus sur le jeu. Dedans, on trouve quelques bâtiments supplémentaires et 3 modules. Le premier est simplement une piste alternative recto-verso plus intéressante pour le trône. Intéressante aussi bien pour ses récompenses (qui valorisent un peu cette option pas forcément évidente du temple) mais aussi pour son intérêt car elle se dédouble au milieu. Dans le second module, on place aléatoirement des tuiles pouvoirs sur les paysages rectangulaires des nations à conquérir: s'il y a déjà assez de jetons conquêtes placés, on peut maintenant y exercer une influence culturelle (façon d'être présent dans les décomptes sans faire de conquête à proprement parler, c'est très astucieux) et surtout elles ont chacun un pouvoir, pour lequel on va sortir un nouveau pion (le vassal) qui va aller squatter jusqu'à la fin de la partie un élément existant du jeu.
Remarquons qu'une action influence culturelle sans tuile (uniquement pour ajouter un jeton à bon compte) peut s'ajouter au jeu de base avec l'ajout de quelques jetons -on se demande pourquoi ils avaient mis cette case si ce n'était pour cela, mais peut-être la règle fut-être supprimée au dernier moment? Cette action est vraiment géniale et renforce encore le côté "jeu dans le jeu" de la partie conquêtes/majorités.
Le troisième module est un très riche en iconographie (de petites tuiles temples de la même forme que les productions et pouvoirs permanents, et qui sont autant de nouveaux pouvoirs complexes). Il comporte aussi des pions multicolores dont l'intérêt tactique est difficile à évaluer par rapport à leur coût. Je ne me vois pas du tout l'intégrer pour le moment car le jeu est assez compliqué comme cela, en particulier pour des nouveaux joueurs! Les deux premiers modules, par contre, ne provoquent aucune surcharge cognitive et sont très bienvenus car ils apportent une variété de mise en place à un jeu qui jusque là possédait surtout une variété de choix en cours de partie. De plus, l'utilisation de ces deux premiers modules n'empêche pas de continuer à utiliser l'aide de jeu originale, car seule l'action d'influence culturelle y est absente.
Pourquoi faire simple dans le titre quand on peut faire compliqué ?
Pourquoi faire simple dans les mécanismes...
Vous appréciez les jeux avec des règles à foison ? Vous allez être servis. L'aide de jeu, salutaire, est au format A4 ...
Néanmoins, ces règles sont bien imbriquées entre elles et permettent d'éviter le fameux ballonnement ludique qui empêche d'apprécier un jeu par surproduction de règles.
Mais c'était limite ...
Une nouvelle fois, on part sur du simple pour le compliquer : à votre tour, soit vous placez un ouvrier et faites les actions qu'il enclenche, soit vous faites deux actions différentes de celles accessibles par une pose d'ouvriers, parmi 4 possibles.
Voilà, c'est tout.
Oui mais, il y a 5 couleurs d'ouvriers, chacune avec sa spécificité, des couts de pose (en carte, en ressource) et on pourra acheter des bâtiments, des statues, construire des escaliers etc : on va pouvoir scorer partout.
Les choix sont nombreux, à l'instar de Five Tribes, qui lui aussi colore les meeples pour les personnaliser, et le plateau à actions rappelle un peu celui de Barbarians, excellent jeu au passage. Et bizarrement, on n'a pas l'impression de petits jeux collés les uns aux autres. On sent l'unité, et la magie opère plutôt très bien.
Sans rien réinventer, le jeu parvient à avoir sa propre identité par plein de petites idées ou de détails bien personnels.
Dommage que quand on ne joue pas à 4, pour trier les tuiles (en retirant les fameuses "3+" ou "4+"), il nous faut sortir un microscope pour trouver le picto. Dommage que les règles manquent de précision (vais devoir partir aux renseignements pour quelques détails non précisés) et parfois proposent des phrases qui soit ne veulent rien dire, soit peuvent vouloir dire plusieurs choses différentes. Fort heureusement, les exemples lèvent alors les doutes.
Dommage que l'illustration expliquant les différentes zones du plateau manque de clarté du fait qu'il aurait fallu faire plusieurs illustrations plutôt qu'une (imaginez qu'il en fallait 3 et qu'on vous les a proposé superposées les unes aux autres - comme si on jouait au jeu "Imagine", justement ...).
Belle richesse et envie d'y retourner même si le coup de coeur total n'est pas là, mais sur ce titre, il pourrait bien arriver avec davantage de pratique. Je conseille...
Vin d'jeu: Le jeu est bon. Sous ses airs de placement d’ouvriers et de gestion de ressources assez classiques, Tawantinsuyu cache un jeu subtil, interactif et équilibré. Même s’il manque un peu de peps et que son thème transpire peu dans les mécanismes, il propose des particularités assez intéressantes comme un choix de 85 actions, des ouvriers spécialisés qui condamnent définitivement une case action, une multiplication des actions en fonction des ouvriers déjà placés et, surtout, des actions pas si secondaires que ça que les meilleurs joueuses arriveront à suffisamment maitriser pour se passer, sur plusieurs tours, d’un placement d’ouvriers somme toute assez inutile.
Si les avis sur Vin d'jeu vous intéressent, c'est par là: <https://www.vindjeu.eu/2020/12/15/tawantinsuyu-lempire-inca/>
Du haut de mes 7 parties , je ne trouve pas que c'est un classique jeu de pose d'ouvrier, comme j'ai pu le lire, il a une vraie originalité.
Chaque couleur de meeple a sa propre particularité (à la Five Tribes) , les axes stratégiques sont variés, on peux en choisir un ou aller sur plusieurs axes.
Effectivement, il y a beaucoup de règles, c'est lourd au début, ce n'est pas un jeu épuré.
Mais le jeu permet une grande liberté.
C'est vraiment un digne descendant de Tzolkin , au même titre que Teotihuacan.
Tzolkin est sûrement mon jeu préféré de posé d'ouvrier. Et grâce à David Turczi qui a sorti avec Danièle Taschini, Tekhenu, qui est aussi un très bon jeu, ils ont su sortir un autre superbe jeu.
En plus à 2 , ça tourne parfaitement et peux se jouer en 1h
Tawantinsuyu montre une nouvelle fois le savoir-faire de David Turczi. Ce jeu de société édité par Pixie Games cache des mécanismes profonds et inspirés, qui plus est en cohérence avec son plateau et son thème. De même, on prend du plaisir à maîtriser l’agencement des actions et des tâches, à être tiraillé entre des choix tactiques sur le court, le moyen et le long terme. Encore mieux, l’auteur est parvenu à apporter un équilibre dans ses rouages, de l’interaction permanente et une course aux points frénétique. En résumé, s’il peut vous plonger dans l’appréhension de prime abord par un ensemble touffu, il nous prend par la main avec son aide de jeu et ne nous lâche plus dès que l’on est à l’aise avec ses mécaniques. Un Expert convaincant dans l’Empire inca.
Chronique et toutes les photos ici : <https://www.tryagame.fr/bar-a-jeux-tawantinsuyu/>
TAWANTINSUYU nous transporte avec beaucoup de plaisir dans une aventure ludique d’une grande finesse qui nous rappelle en même temps quelque chose de déjà vécu et de complètement inconnu. Il est difficile de décrire en détail toutes les subtilités de TAWANTINSUYU tant le jeu est riche, complexe et complet.
L'avis complet : <https://lemeeplejaune.fr/2021/01/08/un-oeil-sur-tawantinsuyu-lempire-inca/>