Le jeu est très sympathique de prime abord, il attire les plus jeunes par ses couleurs, ses morceaux d'île amovibles, ses maisons de couleurs cachées rappelant Clans et ses cartes d'action un peu à la El Grande. Hélas, il ne possède ni le minimalisme acétique du premier ni l'emphase exubérante du second: on est surtout dans un joyeux bazar très souvent frustrant. Ce qui m'amène à évoquer son côté chaotique, incontrôlable, qui n'est pas exactement le problème du jeu, c'est plutôt son injustice abusive ! Le vrai chaos a son avantage, c'est qu'il renouvelle le jeu, casse le côté control freak de certains jeux velus trop sérieux et purement comptables: un jeu fun peut parfaitement faire survenir des événements incontrôlables ou des coups fourrés impossibles à contrer, ce qui collerait bien ici avec le thème de l'Atlantide. Dans Vineta cependant, on tire régulièrement une main ingrate dépourvue d'une certaine catégorie de cartes, sans laquelle les autres cartes ne servent pas à grand chose. Cette mauvaise main qui se renouvelle très lentement va nous obliger à jouer des cartes pour rien, subir le jeu des autres sans même s'amuser à le perturber. Ce système de main à 7 cartes et de séries d'inondations partait d'une bonne intention mais ne fonctionne qu'à moitié, de façon très déséquilibrée: c'est pas vraiment du chaos mais de l'arbitraire. Un jeu comme Condotiere donne une nette impression de chaos lié à la distribution, mais on prend toujours plaisir à tirer le meilleur parti de ses cartes, un peu comme au tarot. Dans Vineta, tout le monde a le même jeu de cartes personnel mais sa répartition ne produit que de la frustration : une sacrée contre performance de game design! Il aurait fallu faciliter un renouvellement possible de la main dans certaines conditions, c'est incroyable qu'ils n'y aient pas pensé. C'est donc un beau rendez-vous manqué, un jeu qu'on aurait vraiment aimé aimer, car le thème est super bien rendu, mais il nécessiterait un bon game doctor pour l'arranger! Tel quel, ses règles ressemblent beaucoup à un jeu amateur pas assez testé (un comble quand on sait qu'il s'agit du remodelage d'un jeu existant).