Ben oui... j'ai pas le permis. J'ai essayé (un peu) de le passer, mais si le code ne fut pas un problème, j'ai réalisé que j'avais peur derrière un volant et puis la vie a fait que j'en ai jamais eu absolument besoin. Alors évidemment quand un jeu a pour thème la fabrique de cette chose qui m'inspire de la crainte, j'ai tendance à regarder ailleurs, SAUF... s'il s'agit d'un jeu du Maestro de Manchester. Et c'est ainsi que je suis devenu l'heureux propriétaire en 2008 d'un exemplaire Treefrog de Automobile, une boite signée qui porte le n° 799.
Assez ignorant (en partie pour des raisons susdites) de l'Histoire de l'automobile aux USA comme ailleurs, à part Ford et Chrysler, j'avais jamais entendu parler des autres personnages qui apparaissent dans le jeu et auxquels vous pourrez faire appel au début de chaque tour. Pour les modèles de voitures, en dehors de la Ford T et des marques Cadillac ou Chevrolet, le reste... la "Stutz AA" ou la "Willys Knight", vous connaissiez ça vous ? En tout cas, on notera déjà que le jeu est bien thématisé, dans ses illustrations, ses références mais aussi par ses principaux mécanismes, on va le voir.
Avec Automobile, vous allez donc vous lancer dans cette industrie en construisant des usines et des voitures de différents modèles, mais aussi vous devrez être un champion de la vente car la concurrence est rude, la demande est évolutive et vous n'êtes là pour marquer des points de prestige mais bien pour faire de l'argent : C'est le plus riche qui gagne la partie après 4 tours de jeux, soit un total pour chaque joueur de... 12 actions.
Aha ! De suite, ça calme ça hein ? Et oui, vous n'avez que 12 actions à jouer pendant la partie, 12 décisions lourdes de conséquence qui peuvent vous amener au plantage comme au succès, qui demande de la finesse, un bon timing, de l'observation, un savoir-faire de stratège et de gestionnaire. Martin Wallace, comme à son habitude, avec des mécanismes relativement simples, vous place assez bien dans la peau d'un baron de l'automobile qui doit planifier ses affaires tout en ayant un œil sur les possibilités du marché, l'innovation et les choix d'investissements de ses adversaires. 12 actions donc, à choisir parmi les suivantes : Construire des usines, placer des distributeurs (du personnel chargé de la vente), faire du R&D (le fameux Recherche et Développement), Produire des voitures, Fermer une usine.
Permettez-moi de revenir simplement sur deux actions :
- Construire des usines... autour du plateau, sont (joliment) représentés des modèles historiques de voitures selon leurs apparitions chronologiques, un peu comme le ferait une rivière de cartes, sauf qu'elle est fixe. Ce système, Martin Wallace va le reprendre plus tard pour Ships et en partie pour Aeroplanes. Oui, le Maestro a toujours été inspiré par les différents moyens de transport. Lorsque vous installer une usine pour sortir un modèle précis, il faut savoir que le temps passe et que l'obsolescence viendra perturber progressivement vos affaires, si bien qu'il faudra fermer cette usine à un moment ou un autre sous peine de perdre de l'argent. J'ai toujours trouver remarquable cette manière de représenter, d'une manière simple et efficace l'évolution technologique et son impact à la longue sur votre entreprise.
- Produire des voitures... c'est un vrai défi pour être rentable et obtenir un bénéfice supérieur à ceux de vos concurrents. Il faut tenir compte du placement de vos vendeurs, des productions adverses sur des modèles équivalents (bon marché, gamme pour classe moyenne ou haute-gamme) et surtout de la demande. Le jeu vous propose en effet un mécanisme simple et astucieux qui vous informe de la future demande de véhicules mais... c'est une information partielle, chaque joueur en ayant "un petit bout" sans connaître les informations des autres. Durant mes parties, j'ai pu observer combien les joueurs tentaient de ruser sur la demande tout en essayant de percer à jour les renseignements que les autres détiennent. Avoir une bonne estimation de la demande permet de produire le bon nombre de voitures pour ne pas se retrouver avec plein d'invendus vendus sur les bras... ou au contraire ne pas avoir assez de stock pour participer à la fête.
Je passe sur les autres actions et bien d'autres aspects du jeu, juste un petit commentaire sur le choix d'un personnage au début de chacun des 4 tours : rien que sur cette phase, vous verrez qu'il y a des implications stratégiques importantes. Chacune de ces personnalités vous apporte un pouvoir particulier que peut s'avérer déterminant à des moments clefs de la partie. A noter que vous ne pourrez pas choisir le même deux fois d'affilées. Un petit mot sur le matériel que j'aime beaucoup, particulièrement les illustrations et les petits véhicules en bois, la réédition VF qui avait suivi avec un matériel et un décorum différent ne m'avait en revanche guère séduit.
Alors en résumé, Automobile est à mon sens une bien belle réussite et il reste une référence sur ce thème ainsi que parmi les créations wallaciennes. Il déploie toute sa puissance à 4 et surtout à 5 joueurs selon moi (le jeu à 3 m'ayant moins convaincu, une variante s'imposerait) et il faut compter 3 heures de jeu plutôt que les 2 heures annoncées. J'en suis hélas un joueur assez moyen et atteindre les 3000 $ en fin de partie est d'abord mon ambition première, le reste n'étant pour moi que du bonus (je crois que 4 100 reste pour le moment mon meilleur score). Songez que les bons joueurs arrivent parfois à 5 000 $ et même plus pour les meilleurs. C'est la raison pour laquelle, sur ma petite échelle personnelle qui mesure le plaisir de jeu, je le place en dessous d'un Age of Steam ou d'un Brass (pour rester dans les jeux de gestion du même auteur) car j'ai vraiment du mal à faire des évaluations correctes et à prendre les risques qu'il faut au bon moment. Toutefois mes faibles compétences ne m'empêchent pas d'accepter une nouvelle partie d'Automobile dés que l'occasion se présente.