"Dieu a créé l'eau pour purifier le corps et le désert pour purifier l'âme"
(Proverbe arabe)
On dirait qu'il y a une mode en ce moment pour évoquer les jeux de vieux sur TT, alors je vais en profiter pour vous parler du troisième meilleur jeu de R. Knizia qui est La traversée du désert. Naturellement, il s'agit d'une troisième place attribuée selon mon classement très personnel, à égalité avec Râ et Samouraï. Les deux premiers ? C'est évident, il s'agit de... Ooh, les petits malins ! Vous avez failli me détourner de mon sujet d'aujourd'hui... et bien je vous répondrai pas maintenant, hé, hé, hé...
La première édition de la traversée du désert remonte à 1998 chez Kosmos sous le nom de "Durch die wüste". Alors qu'avons nous dans la boite ? Et bien dans la version FFG de 2005 (celle présente dans ma ludothèque), vous trouverez un plateau couleur sable (normal, nous sommes donc dans le désert), on aperçoit quelques oasis symbolisés par des palmiers et des montagnes qui bordent le plateau. Le tout est surmonté d'une grille d'hexagones. Avant de commencer la partie, vous devez poser de façon aléatoire des tuiles "point d'eau" de valeurs de 1 à 3 sur des hex. marqués à cet effet, ainsi que des petits palmiers (en plastique).
Je parle pas souvent en détail du matériel dans un avis, mais si je le fais, c'est pour en arriver au chameaux. Car il y a plein de petites figurines chameaux dans La traversée du désert, ils servent à former des caravanes et ils sont de couleur...pastel. Oui, c'est écrit noir sur blanc dans les règles. On a donc des chameaux d'un vert pastel, rose pastel, violet pastel, blanc pastel, et même vert bouteille pastel (enfin je crois, hein, parce que moi et les couleurs...je les vois parfois gris en fait) et c'est charmant... on a presque envie d'en manger. Chaque joueur dispose de cavaliers à sa couleur (orange, vert, violet ou bleu, mais pas de pastel cette fois) afin d'avoir un chef surmontant un chameau de chaque couleur... vous me suivez ? Non ? Ah ben c'est embêtant, parce que justement, le but est de former des caravanes de chameaux de couleur identique (vous pouvez en poser deux à votre tour avec des contraintes qui rendent l'exercice pas si simple que ça) et d'encercler des zones du plateau. Comme au Go, il faut essayer de former des territoires dont chaque case rapportera des points de victoire en fin de partie, tout en récupérant au passage des tuiles oasis qui donnent aussi des points. Relier des oasis avec une chaine ininterrompue de chameaux est bon également pour le score, ainsi qu'un bonus pour la plus grande caravane pour chaque couleur.
La traversé du désert est donc un jeu plutôt abstrait, on ne ressent pas le souffle chaud du vent du désert en y jouant, cependant le matériel (ils sont mignons ces chameaux) aide un peu à ne pas trop y penser. Les chameaux sont à disposition de tous les joueurs, mais (subtilité du jeu) quand une couleur est épuisée, cela déclenche la fin de partie.
Ma partie découverte, je m'en souviens un peu. C'était au cours d'un week-end jeux, elle fut jouée tard dans la nuit après des parties de Goa et Caylus. Donc, je peux le dire, après des jeux comme ça, j'avais trouvé La traversée du désert un peu fade, au déroulé sans surprise et j'avais surtout hâte d'aller me coucher. Quelques mois plus tard, le hasard me conduisit à y rejouer, et là, un des joueurs m'a montré que La traversée du désert est bien plus intéressant qu'en apparence avec des finesses liées aux conditions de pose et au tempo du jeu imposé par la disparition d'une couleur. Simple mais efficace cette création kniziesque et aujourd'hui, j'aime bien la proposer sur une table de temps à autres car les règles s'expliquent rapidement et on peut y jouer même avec des joueurs très occasionnels. Mais attention : La traversée du désert demande de la vista et de l'anticipation. La phase de placement de vos chefs en début de partie ne doit surtout pas être jouée à la légère et avec des connaisseurs, la plupart de vos chefs peuvent voir rapidement diminuer leurs possibilités de développement. Dés qu'une couleur de chameau commence sérieusement à diminuer, on se met à surveiller les autres du coin de l'oeil et se demander "Est-ce que j'ai intérêt à accélérer ou au contraire ne pas participer à la diminution de cette couleur ? Aurais-je le temps de finir telle ou telle caravane ?" Il y a donc des aspects tactiques mais aussi stratégiques assez subtils pour faire de La traversée du désert un peu plus qu'un simple jeu de chainage.
"Le plus difficile dans le désert, c'est de trouver la sortie"
(Proverbe sans doute pas arabe)