Un jeu de stratégietrès correct, mais à mon avis loin de détrôner les meilleurs du genre. Par rapport à un Blood Rage ou Kemet, déçu de la personnalisation de son dieu : même plateau d'upgrades pour tous, mêmes cartes combat, mêmes gardiens pour tous...(les monstres ont un impact faiblard en plus) . Au final à la fin du jeu, on se ressemble tous plus qu'au début ! Un peu trop calculatoire, on espère de l'inattendu, des rebondissements. Surtout les combats qui manquent de tension (malgré des cartes comme la pluie de sauterelle), jamais vraiment eu de surprise sur le résultat d'une bataille. Il suffit de prévoir un ou deux combats avec 1 figurine pourrie pour reprendre ses cartes en main. Les enchères de Rising Sun sont mieux réussies de mon point de vue, car c'est n'est pas tout où rien, et la planification des batailles successives a une vraie importance. Ou les cartes divines dans Kemet qui apportent du piquant et du bluff.
Je parle même pas de la fusion qui est hyper polémique (possibilité de se sentir "éliminé" alors qu'on collait aux points, pseudo-coop chelou...).
Inis est un jeu qui mêle draft et contrôle de territoire à la perfection.
Certains prétendent que le jeu est imprévisible et chaotique : soyons clair, si vous n'aimez pas qu'un autre joueur vienne foutre vos plans en l'air, vous forçant à adapter votre stratégie, vous n'aimerez pas Inis.
D'un autre côté, dans ce cas pourquoi jouer à un jeu à forte interaction où on se bat pour le contrôle des mêmes territoires ? Surtout qu'il y a moins de 20 cartes d'action de base, donc on les connaît rapidement. Les combos ne sortant pas de nul part.
Bon vous, vous aimez l’interaction, vous aimez élaborer des plans machiavéliques, éructer de jouissance quand ils s'exécutent à la perfection, et jurer revanche quand ils foirent (mais c'est de votre faute, fallait un meilleur plan !).
Le cœur du jeu, c'est le draft : je prends ce qui m'arrange, le laisse le reste au voisin, et on recommence, jusqu'à avoir une main plus ou moins potable, et on essaie de faire au mieux. Surtout, mieux que les autres. Et ces cartes sont très très précieuses : à la fois vos actions et vos ressources pour le tour.
Là où le chaos n'est pas présent, c'est qu'on connaît toutes les cartes en jeu : on sait exactement de quoi nos adversaires sont capables. On ne sait pas précisément qui ou quand, mais on peut le deviner.
Autre point très important : on peut "passer" son tour, mais rejouer ensuite. Ce qui permet de prendre des risques, car si tout le monde passe on perd le reste de nos cartes (donc de nos actions pour le tour, bonjour la main de merde au tour suivant), mais si ça passe on laisse les autres "gâcher" leurs cartes, et on peut enchaîner tranquille son combo sans que les autres puissent réagir.
Il y a donc une espèce d'aspect bluff/dissimulation/tromperie, qui pousse à être suffisamment rusé pour jouer ses meilleurs coups au meilleur moment, et à inciter les autres à faire n'importe quoi. On se place en douce sur le plateau, et le piège se referme... Le problème c'est que tout le monde essaie de faire pareil !
Inis n'est PAS un jeu de combat. D'ailleurs, le combat ressemble plus à un exercice sado-maso, où le consentement est de mise. "- Tu veux perdre des cartes ? - Euh non. - Tu veux perdre des hommes ? - Euh non. - Bon alors tu me laisses planter ma tante dans ton jardin, on est que 2 : moi et ma tribu. - Euh bah ok, peace." Hélas, parfois il faudra se faire violence... Moi ça me plaît la violence.
Les cartes épiques, les cartes rouges, sont plus difficiles à avoir, et puissantes, que les cartes classiques, mais en général assez spécifiques, ce qui oblige à des stratégies parfois originales et rend ces cartes plutôt équilibrées. Avec les cartes récupérées sur les territoires qu'on contrôle (il faudra faire plusieurs parties pour tous les voir), le jeu offre une bonne rejouabilité, en plus d'une certaine finesse qui se découvre au fil des parties.
Inis est aussi un jeu de placement, où il faudra garder un œil sur tout le monde si vous ne voulez pas qu'un adversaire remplisse une des trois conditions de victoire en douce. Il ne s'agit pas seulement de "contrôler" un territoire avec vos troupes, en fait vous pouvez même gagner sans être majoritaire (ou "chef"), nul part, mais en étant au bon endroit au bon moment.
Il reste plein de choses à dire, notamment sur ces conditions de victoire originales, qui permettent aux moins forts de revenir dans la partie sur un bon coup (1 mec sur un territoire qui contient 6 sanctuaires gracieusement construits par les autres et BAM !).
Et que dire de la direction artistique exceptionnelle : j'achète une 2e copie pour encadrer les cartes ?
Bref, ce jeu est comme mon Inis : profond et subtil.
D'un point de vue ludique, Kemet ne devrait pas fonctionner : c'est une espèce de bâtard entre jeu de gestion et jeu de contrôle de territoire qui bafoue allégrement les règles de ces deux genres.
Par exemple, vous perdez une bataille, vous pouvez retraiter vos troupes, logique... Ou bien sacrifier les survivants en "points de prière", sans pénalité avec un ratio de 1 pour 1, pour recruter autant de braves soldats suicidaires juste derrière !
Et bon, normalement, dans les jeux de contrôle de territoire, on fait gaffe à ses voisins trop proches, on bloque avec de grosses armées les points stratégiques pour les empêcher d'attaquer notre base... Là je me téléporte partout sur la carte pour poutrer qui je veux, quand je veux, YOLO. Personne n'est à l'abri.
Et puis oui, il y a des points de victoire. Mais par défaut on ne peut les obtenir qu'en remportant une bataille... mais uniquement en tant qu'attaquant ! Les dieux d’Égypte n'aiment pas les lâches, et ils ont raison.
Malgré ces bizarreries, bah ça fonctionne ! Plutôt bien même. Parce que tous les mécanismes de Kemet n'ont qu'un seul but : l'escalade de la violence. Alors si vous n'aimez pas la guerre acharnée et sans pitié, autant vous le dire tout de suite : évitez ce jeu.
Pour les autres, ce sera le pied. Le système de combat à base de cartes (à mort le hasard !) oblige à des choix cornéliens. Les tuiles de pouvoirs vous permettront de construire une armée aux petits oignons, adaptée sur mesure à votre stratégie préférée. Et puis, le jeu est magnifique comme le nez de Cléopâtre, avec plus de plastique quoi.
Le thème n'est pas très immersif, et pourtant on se sent comme un dieu : à commander des unités monstrueuses, à sacrifier ses troupes, à faire couler le sang par hectolitres, et à sentir sa puissance grandir au fil des tuiles accumulées.
N'allez pas croire que c'est un jeu bête et méchant : l'ordre des actions, l'ordre du tour, la gestion des cartes combat, le positionnement des unités, les combos de tuiles... Autant d'éléments qui vous retourneront bien le cerveau si vous cherchez à jouer de façon intelligente.
Les règles de Kemet sont accessibles, ce qui est très bien, mais on peut leur faire le reproche d'être trop vagues sur certains points : préparez votre FAQ.
En parlant de règles, celle de l'ordre du tour, sans être problématique, peut provoquer de mauvaises surprises en cas de manque de vigilance. Le dernier joueur en terme de score peut subitement remporter la partie s'il prépare bien son coup, car il joue en dernier sans que les autres puissent nécessairement l'empêcher d'agir.
L'extension propose d'ailleurs une règle alternative pour l'ordre du tour et les conditions de victoire (je recommande).
Cela n'empêche pas Kemet d'entrer au panthéon des jeux de "dudes on a map". A la fois bourrin et tactique, subtil et violent, Kemet est mon bâtard préféré.
Dogs of War est un jeu de guerre, mais pas vraiment sur un plateau, non non, plutôt entre vos amis. Un massacre même. Oh oh oh, vous allez trahir plus d'amis que si vous étiez candidat à la présidentielle.
A la base, on reproche souvent aux jeux de placement d'ouvriers de ne pas être assez interactif. Il y en a qui aiment, faire leur solitaire dans leur coin. C'est zen, c'est paisible.
Paolo Mori lui s'est dit tiens, si je faisais un jeu de placement d'ouvriers qui est tout l'inverse : le jeu le plus interactif, agressif, vicieux et traître du monde ludique. Et ce génie a réussi.
Et là, j'en ai perdu la moitié, et c'est tant mieux : ils auraient détesté ce jeu.
Dogs of War est donc assez simple : vous avez un nombre limité de capitaines (vos ouvriers), que vous allez placer sur autant de cases du plateau qui représentent des batailles. Vous avez en main des cartes (vos ressources), qui représentent des unités que vous pouvez dépensez librement pour gagner ces batailles.
Sauf que, ces batailles se jouent contre les joueurs qui ont placé leur capitaine sur le champ de bataille opposé... Et là, c'est le drame.
Ici, votre capitaine n'est qu'un leurre : vous êtes venus pour le bonus de la case, et forcer l'adversaire à dépenser ses précieuses unités.
Là, vous faites croire à votre allié qu'il a ses chances, avec vous à vos côtés, s'il investit quelques cartes, la bataille est gagnée d'avance... Enfin, jusqu'à ce que vous jouiez une carte traîtrise pour passer de l'autre côté.
Mais surtout, il y a votre capitaine seul sur une bataille ignorée, a priori pas très intéressante en récompense, mais qui vous permettra de gagner des jetons d’allégeance envers une des grandes maisons, qui vous rapportera un flot de points victoire en fin de partie.
Enfin, encore faut-il que cette maison ne perde pas trop de batailles : elle tomberait dans le déshonneur, et vos points de victoire dans la poubelle.
Donc en somme, un gros jeu de bâtard de traître comme on les aime, ultra opportuniste.
Attention au facteur chaos lié aux cartes actions secrètes de chaque joueur : cela peut être l'élément de trop qui vous fera renoncer à ce jeu.
Pour les autres, hé mais, c'est quoi dans ton dos ? Un poignurrghgh
Grand classique du jeu de contrôle de territoire, Smallworld cumule beaucoup de vertus : règles accessibles, graphismes sympathiques, races et pouvoirs variés, hasard très limité...
Beaucoup de choix tactiques à faire (quel peuple je choisis, quand est-ce que je passe en déclin, est-ce que j'attaque, où ça, à combien, etc...), et moi les choix j'aime ça, ça fait des bons jeux.
Par contre beaucoup de choix, ça veut aussi dire que ça traîne en longueur : à éviter à 5 joueurs donc si vous ne voulez pas voir le temps de jeu exploser ! Surtout si vous aimez discuter/palabrer/négocier/mendier pour votre misérable vie, style "mais si tu vois bien que c'est lui qui gagne et puis mon territoire il est pourri t'en veux pas de tout façon je suis dernier".
Autre petit défaut : le nombre de combos peuples/pouvoirs apporte certes de la variété, mais aussi quelques problèmes de règles, avec des exceptions et cas particuliers qui peuvent vous le mettre dans l'os (gardez une FAQ sous la main...).
Au final, un jeu bien sympathique si vous aimez vous tapez dessus sans lancer des brouettes de dés.