Unlock! est un jeu que j'avais très envie de détester, pour des tas de raisons (plus ou moins bonnes j'imagine) dont je ferais l'économie. Sauf que je n'y suis jamais parvenu parce que je dois reconnaître à mon corps défendant que c'est vraiment très bien.
C'est très bien parce que c'est simple mais diablement ingénieux ; la mécanique de base est souple et efficace et, jusqu'à présent, les auteurs sont parvenus à proposer des puzzles inventifs et variés SANS avoir à modifier le système à l'envie. Et ça c'est fort. En fait j'ai l'impression que le fait de respecter un cadre strict agit comme un moteur créatif efficace et un filtre qualitatif (en tout cas pour les trois premières boites - je n'ai pas joué la suite). Je ne sais pas dans quelle mesure les auteurs sauront renouveler le concept mais je suis d'ors et déjà surpris de sa robustesse.
Tout n'est évidemment pas parfait. Certains scénarios échouent à concilier histoire et puzzles. Les aides de jeu ne permettent pas forcément de se sortir d'un blocage frustrant. Les cartes sont petites, ce qui n'est ni très convivial (les puzzles résolus avant même que tous les joueurs aient eu le temps d'en prendre connaissance) ni très judicieux quand la résolution d'un puzzle fait appel à un détail.
Mais dans l'ensemble il s'agit là de menus défauts qui s'effacent devant l'efficacité des puzzles (dont la difficulté me semble globalement bien ajustée, avec ce qu'il faut d'exigence), la qualité des graphismes et des ambiances proposées, et le plaisir de jeu. En fonction de la sensibilité de chacun les aventures qui ressortent de chaque boîte ne sont pas forcément les mêmes mais globalement sur trois aventures il faut compter avec une aventure qui sort du lot, une autre moins surprenante mais efficace et une dernière forcément un peu décevante.
Critique dont je dois concéder qu'elle sera forcément peu pertinente tant Terra Mystica révélait sa profondeur avec l'expérience - expérience que, précisément, je n'ai pas encore avec Project Gaïa.
De fait après mes premières parties j'ai du mal à y voir autre chose qu'une déclinaison dans l'espace de Terra Mystica, ni moins mais ni plus efficace. Ce qui est déjà un compliment tant je considère ce dernier jeu comme l'un des tous meilleurs qui soient sortis ces dix dernières années (ne serait-ce que parce qu'autour de moi il ressort encore très régulièrement, au contraire de tant d'autres 'grands' jeux qui encombrent désormais les placards).
J'ai surtout l'impression que le changement d'univers et les petites variations du système apportent un sentiment de renouvellement bienvenu auprès de joueurs qui ont de très nombreuses parties de Terra Mystica au compteur. Personnellement j'ai renoncé à effectuer la transition même si je me réserve la possibilité de changer d'avis avec quelques parties supplémentaires. En particulier parce que la recherche permet peut-être des stratégies plus ouvertes qu'à Terra Mystica, avec une dépendance moindre aux spécificités de son peuple et à la topographie du plateau. Mais là je spécule, je n'ai pas une expérience suffisante pour en juger.
Quoiqu'il en soit Project Gaïa est un put\* de sacrément bon jeu et il est tout aussi recommendable que Terra Mystica si l'on ne possède ni l'un ni l'autre.
Alors dans la boîte moche de Dead Panic se cache... roulement de tambour... du matériel moche pour jouer à un jeu coopératif presque totalement raté. La prise de contact commence avec des règles approximatives et mal écrites et qui soulèvent déjà des interrogations à la simple lecture (dont le fait évident que la difficulté ne s'ajuste pas selon le nombre de joueurs mais j'y reviendrais très vite). Seule idée qui soulève une pointe d'intérêt : un survivant mort - oxymore - revient comme zombie et son joueur cherche à faire perdre la partie pour se venger.
La mécanique paraît basique et répétitive et elle l'est. Mais surtout elle est à ce point prévisible et mal réglée que la défaite paraît tout simplement impossible. Le jeu est tellement facile que même en réduisant le nombre de survivants (ce qui accroît sensiblement la difficulté) la victoire est assez aisément acquise, ce qui rend inutile d'ajuster la difficulté selon le nombre de joueurs. J'en suis venu à contrôler avec la règle anglaise et à parcourir les forums de BGG pour vérifier que je ne comprenais rien de travers. Mais non.
Dead Panic est moche, sans grand intérêt ludique et de toute manière tellement mal réglé que la défaite est impossible. A éviter absolument.
Drôle d'idée d'avoir fait de La Nuit la Plus Longue une extension en forme de boîte indépendante. En effet le surcoût est difficilement justifiable pour les possesseurs de Dead of Winter, même si une grande partie du matériel vient en supplément.
Pris indépendamment le jeu s'avère à mon avis plus frustre que la boîte de base malgré les nouveautés. En particulier la présence de 'seulement' 20 survivants est difficile à avaler, d'autant que les capacités de ces derniers s'avèrent ludiquement moins intéressantes que celles des 30 survivants qui figuraient dans la boîte de base (je comprends bien qu'il s'agit de ne pas faire doublon mais du coup elles complètent plus qu'elles ne suppléent celles-ci). C'est sans doute moins sensible pour le reste des composants mais il a néanmoins fallu faire des coupes dans le matériel pour faire rentrer les nouveaux modules.
Et comme extension alors ? Cela va des petits ajouts sympas mais un peu anecdotiques à trois modules d'intérêt et d'importance croissante : les améliorations de colonie, les bandits et Raxxon. Alors ceux-ci remplissent l'objectif : ils renouvellent et apportent des variations bienvenues au jeu de base. Mais font regretter dans le même temps de n'avoir pas une vraie extension et que tout le matériel ne soit pas consacré à compléter la boite de base et développer les nouveautés, en particulier Raxxon.
Personnellement je suis déçu ; j'aurais aimé que Raxxon bénéficie d'un développement plus important et peut-être une approche un peu plus scénarisée du jeu par la même occasion (en particulier pour le jeu purement coopératif, Dead of Winter n'étant pas forcément à son avantage dans ce mode).
Les jeux qui supposent d'assembler un carré de tuiles avec des règles de proximité / composition sont légions. Si le genre est fondamentalement familial Mad City en est à mon goût la meilleure déclinaison et figure parmi les plus joueuses à ma connaissance.
Pour coller à la thématique 'city builder' les tuiles se déclinent selon le classique RCI de Sim City (pour Résidentiel / Commercial / Industriel) avec en plus des tuiles d'espaces verts et des tronçons de route. Tous les joueurs reçoivent leurs éléments face cachée et composent simultanément et en temps limité leur ville.
Le système de score fait appel à toutes les subtilités possibles à partir de ce principe de base : route la plus longue, taille des zones (avec un système assez malin qui valorise la valeur des zones d'une manche sur l'autre), pari sur les majorités et rapidité à assembler sa ville.
Vraiment il n'y a pas grand chose à reprocher à Mad City - si ce n'est son matériel moche - un jeu certes léger et familial mais très efficace et malheureusement passé sous le radar.
Je vois Magic Maze comme un genre d'héritier plus grand public de l'excellent Space Alert, même s'il diffère sensiblement (et n'en a pas toutes les qualités ludiques). On retrouve néanmoins une même idée fondamentale : celle d'un jeu coopératif en temps réel où une communication parasitée et la panique du chronomètre annihilent l'effet 'leader' plus ou moins gênant souvent inhérent au genre. Et plus accessoirement des scénarios de difficulté progressive pour découvrir les mécaniques de jeu en y jouant (notamment les contraintes de plus en plus importantes liées à la protection du magasin).
Dans Magic Maze on incarne une équipe de voleurs dans un magasin d'objets magiques, avec un déroulement en deux séquences : d'abord le vol puis la fuite. La coopération est imposée par le fait que chaque joueur ne dispose que d'une partie des actions accessibles aux héros (aller à gauche / à droite / en haut / en bas / explorer / emprunter certains accès, etc.) et le bordel généré par le fait que tous les joueurs peuvent contrôler tous les héros. La communication est parasitée par le fait qu'il est... interdit de communiquer. Sauf circonstances spécifiques et assez restrictives.
Personnellement j'apprécie beaucoup Magic Maze, original et malin, et le joyeux bordel des parties mais force est de constater que le jeu souffre de défauts plus ou moins gênants qui sont la contrepartie de ses qualités et qu'il est donc loin de faire l'unanimité. Selon le nombre de joueurs et le hasard de la répartition des actions certains joueurs se sentiront inutiles (et parfois - encore qu'assez rarement me semble-t-il - avec raison). Sa mécanique de base est assez superficielle - et peut vite sembler répétitive. Et le fait de ne pouvoir parler donne une ambiance... assez spéciale... et pas forcément aussi conviviale que ce qu'on attend généralement d'un jeu de société. On peut très bien passer outre (d'autant que les parties sont courtes) mais je conçois que ces défauts puissent chagriner certains joueurs.
Slide Quest reprend beaucoup de l'excellent Looney Quest pour le décliner à la sauce coopérative (et coordination en l'espèce) en adaptant le classique du jeu d'adresse qu'est le labyrinthe inclinable avec une bille. L'idée est bonne - très bonne même - et la conception plutôt ingénieuse de prime abord. Sauf qu'elle révèle vite ses limites à l'usage (le personnage glisse assez mal et de manière irrégulière et le plateau s'oriente parfois bizarrement) alors même que les parcours les plus difficiles demanderaient une précision sans faille. En trichant un peu (en tapotant les languettes pour déplacer le personnage par petits à-coups) on contourne cette difficulté mais ce n'est pas vraiment satisfaisant. De fait je suis un peu sceptique sur la cible du jeu car, pour ce que j'ai pu constater sur différents festivals, le jeune public semble se lasser assez vite de ces errements. C'est dommage car le jeu est plutôt sympathique en l'état et il aurait sans doute été très bon avec du matériel adapté (et j'aurais alors volontiers cédé aux joies du time-attack).
J'ai beau être un vieux joueur je ne connaissais pas ce Spiel des Jahres 1997, coincé entre l'excellentissime El Grande et le très bon Elfenland et, me semble-t-il, plutôt oublié. Le jeu propose une course de bateaux à aubes sur le principe de Formule Dé, avec la contrainte d'embarquer deux passagères en cours de route (passagères qui se présentent en nombre limité et dont l'embarquement suppose d'accoster à un embarcadère à vitesse minimale). C'est un peu frustre sur le principe et finalement assez peu palpitant, d'autant que le premier joueur à réussir la condition d'embarquement prend une sérieuse option sur la victoire. Dans un genre assez proche un Rivière d'Enfer me semble nettement plus amusant. Je n'ai aucun doute que la version Super Meeple sera très chouette au niveau matériel (jeu testé avec la boîte allemande d'origine) mais je suis particulièrement dubitatif sur la pertinence de cette réédition, au contraire des jeux retenus jusqu'à présent.
Avec le succès (mérité) de Codenames CGE poursuit dans les jeux de mots. Sous son enrobage sophistiqué (et passablement artificiel) Trapwords reprend la base du Taboo en y injectant une dose de double-guessing puisque c'est l'équipe adverse qui décide des mots interdits. Le principe n'est pas idiot et le jeu s'avère assez sympathique, même s'il n'a ni l'élégance ni la subtilité de Codenames. D'autant que les choix opérés en matière de mécanique de jeu en font quelque chose de moins spontané et hystérique que le Taboo et, me semble-t-il, de sensiblement moins amusant à jouer si l'on considère sa vocation de party game.
Avec Bunny Kingdom Richard 'Magic' Garfield nous propose un jeu de draft au pays des lapins. L'objectif est de former des fiefs constitués de cases contiguës ; à la fin de chaque manche les fiefs rapportent le produit du nombre de ressources différentes qui y sont produites et des forteresses présentes. Les cartes draftées représentent soit des cases du plateau, soit des constructions à placer (pour l'essentiel ressources ou forteresses) soit des objectifs de fin de partie (secrets) qui rapportent des points bonus. Le jeu est plutôt plaisant à jouer et le matériel très joli. Après je précise ne pas être particulièrement adepte du genre mais sa déclinaison dans Bunny Kingdom ne me convainc pas vraiment. L'aléa du draft me semble un peu trop important (même s'il n'est pas non plus rédhibitoire), le plateau n'est pas très lisible et le calcul du score assez laborieux (et plus encore avec l'extension j'ai l'impression), et surtout il n'y a pas vraiment de possibilité de bloquer le jeu de ses adversaires (le système de score fait qu'il est impossible de négliger ses propres intérêts à cette fin et, au contraire d'un 7 Wonders par exemple, aucune action ne permet de sacrifier une carte qui intéresserait un adversaire pour en tirer malgré tout bénéfice). Plaisant mais loin d'être parfait.
Kingdomino est un excellent jeu, aucun doute là-dessus. Mais c'est un vrai jeu familial (catégorie avec enfants donc), sans grande profondeur et quasiment sans intérêt aucun pour un joueur assidu. Le jeu décline un genre bien connu qui consiste à former un carré, généralement de 5 tuiles par 5 tuiles, avec des contraintes de pose et un calcul du score qui dépend de la composition du tableau final. Certains sont plus élaborés (et plus susceptibles d'intéresser des joueurs avertis) que Kingdomino mais, dans son genre, il faut lui reconnaître une simplicité et une élégance rares ; tant dans le recours aux dominos (qui sous-tend ses autres qualités) que dans le calcul du score et l'ordre du tour. Force est de reconnaître que Bruno Cathala a encore frappé juste !
Shadows Amsterdam tente la synthèse maladroite de quelques éléments à succès de mémoire récente ; on y retrouve pèle-mêle du Dixit (on communique avec son équipier via des images), du Codenames (il faut faire découvrir les bons indices à son équipier tout en évitant les lieux interdits), du déroulement simultané et un univers graphique issu du jeu vidéo (ici manifestement inspiré de Sly Raccoon).
Quant à ce dernier point - question de goût - mais pour ma part c'est rejet immédiat. Les illustrations sont de qualité mais je n'adhère pas.
Ludiquement je suis également très réservé, même si le jeu s'avère jouable et raisonnablement plaisant. La mécanique n'a pas la subtilité d'un Codenames, les illustrations ne se prêtent pas à des associations aussi riches qu'un Dixit / Mysterium et la configuration du plateau ne permet pas une lecture aisée de celles-ci. Sauf à connaître le plateau par cœur, ce qui risque d'arriver rapidement car il n'est pas très varié.
Mais surtout le déroulement en simultané noie l'élégance d'un coup dans la frénésie ; le jeu ne laisse pas le temps des belles associations et on perd la possibilité de suivre le jeu de ses adversaires, et donc de s'incliner devant leurs propres trouvailles et réussites improbables. Dommage.
Derrière son titre grotesque et une boîte qui fait office de repoussoir Mission Pas Possible (Fuse en VO) cache un coopératif d'autant plus malin que sa mécanique ludique rencontre idéalement son thème. C'est d'ailleurs ce qui fait la réussite d'un jeu qui apparaîtrait sans doute trop limité sans cela.
Dans Fuse on désamorce des bombes avec des dés, en temps réel (10 minutes, les joueurs jouant en simultané). Chaque bombe est de complexité variable et doit être désamorcée avec une combinaison particulière de dés (nombre, couleurs et valeurs). A son tour un joueur lance autant de dés qu'il y a de joueurs au total et chacun doit en prendre un pour le placer sur l'une de ses deux bombes. A défaut chaque dé non placé inflige une pénalité à tous les joueurs (sous la forme d'une perte potentielle d'un dé déjà placé).
Une bombe désamorcée est aussitôt remplacée par une nouvelle bombe de la pioche (qui contient également des pénalités), chaque joueur ayant toujours deux bombes sous son attention ; la partie est gagnée quand la pioche est épuisée et perdue quand le temps tombe à 0.
C'est simple et efficace grâce à la pression du temps et à l'aléas des tirages qui s'avère parfaitement adapté et justifié dans le cadre de la mécanique de Fuse. Un très bon titre coopératif, avec une ambiance bien stressante, qui permet une rupture appréciable le temps d'une ou deux manches entre deux jeux plus costauds.
Root est un genre de wargame simplifié et très asymétrique, offrant quelques jolies réminiscences de Dune, la traîtrise en moins (disons plutôt que la victoire dans Root s'appuie davantage sur le plateau et moins sur la diplomatie) et la rapidité en plus. Accessoirement Root est un excellent jeu, de ceux qui sortent véritablement du lot par quelques qualités rares :
- le thème ! Root raconte une histoire (qualité qu'il partage avec Dune), parfaitement intégrée du système de jeu au matériel. Graphiquement le jeu est adorable et son univers attachant, à la fois charmant mais sans être mièvre et avec une identité propre.
- l'asymétrie ! Celle-ci se présente façon améritrash : elle est intégrée au cœur des règles. Il ne s'agit pas uniquement de peuples avec des capacités distinctes mais qui fonctionneraient sur une base commune. Ils se jouent de manière radicalement différente, avec comme contrepartie un équilibre fondamentalement pensé pour une configuration idéale de 4-5 joueurs compte tenu des interdépendances.
- la mécanique ! Root est à la fois très simple à jouer (même si l'apprentissage est relativement long du fait qu'il faut aussi connaître la manière de jouer de ses adversaires), dans un format rapide et dynamique, mais les parties sont intenses et disputées.
- le plaisir ! C'est bête à dire mais Root est très agréable à jouer ; le plateau - et donc l'état de la partie - est lisible, le matériel bien conçu et le jeu contourne assez habilement (sans l'éliminer totalement) le travers habituel du genre qu'est le king making. Les factions se remettent assez bien d'un gros contrecoup et la nécessité de marquer soi-même des points de victoire limite l'intérêt d'une guerre totale.
A mon avis un très grand jeu : thématique, joli, finement réglé et passionnant à jouer. Ma principale réserve tient aux équilibres qui me semblent très fluctuants lorsque l'on sort de la configuration idéale.
Préambule : je le sais, le "bon" goût de l'un est généralement le "mauvais" goût d'un autre. Passé ce constat je peux m'attaquer à la critique d'Adrénaline en toute mauvaise foi et sans modération.
Adrénaline se propose donc de traduire le genre vidéo-ludique du jeu de tir en jeu de plateau. Si l'idée est en elle-même totalement absurde (ce qui fait l'intérêt d'un jeu de tir ne saurait y trouver d'équivalent) je veux bien admettre que cela n'empêche en rien de concevoir un bon jeu dans l'absolu. Las, ce n'est ici pas vraiment le cas.
Déjà Adrénaline est laid. Profondément laid même, qu'il s'agisse du matériel ou de l'univers (duquel participent les illustrations affreuses et un manuel indigent comme jamais).
Ensuite Adrénaline réussit à cumuler un système basique et pourtant particulièrement laborieux à l'usage (en grande partie du fait des armes et de tas de petits sous-systèmes inélégants qui me laissent l'impression d'un bricolage de fortune). Avec pour résultat un délai affreusement long dans le déroulement de la partie.
Enfin et surtout parce que le système manque cruellement de profondeur, même tactique. C'est frontal et trop chaotique et imprévisible pour essayer de construire son jeu autrement que sur l'opportunisme.
Adrénaline est un jeu d'une grande banalité - pas spécialement injouable mais sans intérêt ludique particulier et, à mon sens, franchement ennuyeux. Dans un genre assez proche Arcadia Quest me semble préférable à tous niveaux (plus riche, plus varié, mieux conçu et plus tactique, etc).
Et sinon il est toujours temps de se mettre au wargame.
Il me semble que le matériel très coloré est quand même LE point qui retient l'attention de Sagrada - logique alors qu'il va y être question de vitraux. J'ajoute que si ledit matériel est joli il est également d'assez mauvaise qualité (en tout cas dans la version originale - en particulier s'agissant des cartes).
Pour le reste Sagrada propose une variation sur le principe désormais bien connu qui consiste à composer une grille de tuiles (remplacées ici par des dés) au format 5 x 5 (ici 4 x 5) avec des contraintes de pose et qui score en fonction de motifs de composition.
Et là Sagrada se révèle efficace sans être pour autant très innovant ou spécialement meilleur que d'autres jeux du genre - en tout cas rien que semble de nature à justifier le petit buzz suscité, en dehors de son aspect visuel. Certes la mécanique de draft est tendance mais elle n'a pas ici une importance fondamentale.
Les contraintes sont assurées par l'existence de cases avec des valeurs ou des couleurs de dés prédéterminées et l'interdiction de poser côte à côte deux dés qui partagent un même élément, le score est fonction d'objectifs dont trois sont communs et le dernier secret et propre à chaque joueur, et enfin des cartes spéciales permettent, mais de manière très limitée (à la fois dans l'effet produit que dans le nombre d'utilisations permises), de manipuler les dés.
Un jeu sympathique, plutôt familial sur le principe mais sans exclure le public joueur, et tout à fait recommandable - mais pas spécialement meilleur que de nombreux autres titres du genre ; dans le cas de Sagrada le principal tempérament vient de l'aléa des tirages de dés combiné à l'importance de l'objectif secret.
EDIT : j'aimerais noter 7,5 mais rien à faire, avec le système pourri du site j'obtiens visuellement un 7 ou un 8. Ça sera donc 7.
Dream Home propose une n-ième déclinaison sur la base de la construction d'un tableau de tuiles, avec des contraintes de pose et un calcul du score fonction de la composition finale. Le graphisme et le matériel sont plutôt agréables et affirment la vocation plutôt familiale du jeu.
Sur le plan ludique Dream Home s'efforce de proposer une variation plus élaborée que la moyenne sur le principe de base, mais sans toutefois le renouveler ou trouver une mécanique originale qui lui permette de se démarquer :
- les joueurs choisissent dans l'ordre du tour une paire de carte parmi l'offre proposée, qui se réduit d'autant ; l'offre est constituée à chaque tour d'autant de paires que de joueurs, chaque paire se composant d'une pièce de la maison et d'une carte ressource qui ajoute au score ou permet un effet de manipuler son plateau. L'offre comporte en plus une pièce seule, dont la sélection permet de devenir premier joueur au tour suivant.
- certaines pièces ne peuvent être posées qu'à un emplacement particulier de la maison et, plus généralement, une pièce ne peut être posée que si l'emplacement correspondant de l'étage inférieur a été bâti. Chaque type de pièce possède évidemment sa propre manière de marquer.
En pratique cette relative sophistication n'aboutit pas à un jeu qui se révélerait spécialement meilleur que d'autres titres plus épurés, au contraire même avec des règles qui contredisent un peu son orientation familiale. Dream Home est sympathique mais ne sort pas du lot et ne saura vraisemblablement pas intéresser durablement des joueurs.
Unusual Suspects est un party game coopératif plutôt marrant dans son genre - une sorte de Qui-est-ce? à l'envers qui repose sur le délit de sale gueule (ou plus précisément sur les stéréotypes qui peuvent ressortir à la vue d'une personne).
En pratique l'un des joueurs incarne le témoin, seul à connaître l'auteur d'un crime. Les autres joueurs incarnent les enquêteurs qui cherchent à identifier le criminel parmi douze suspects. A tour de rôle les enquêteurs posent une question (lue sur une carte piochée au hasard) au témoin qui ne peut répondre que par oui ou non. L'astuce étant que les questions ne portent jamais sur l'apparence physique du criminel. Après cela les enquêteurs doivent convenir entre eux des suspects à éliminer (au minimum un). L'enquête se termine quand il ne reste qu'un unique suspect et elle est gagnée si cet ultime suspect est bien le criminel - avec un score qui dépend de l'efficacité de l'enquête.
Evidemment la mécanique ludique est mince (les enquêteurs n'ont pas le choix des questions et le score final est une faible motivation en lui-même) et on n'enchaînera pas les parties bien longtemps. On pourra également reprocher au jeu de faire ressortir le pire des stéréotypes et je comprends qu'il puisse mettre le pauvre témoin dans l'embarras. Personnellement joué en bonne compagnie je le trouve plutôt drôle et efficace dans sa vocation de jeu d'ambiance. Et je choisis de penser qu'il interroge assez intelligemment notre rapport aux stéréotypes.
Watson & Holmes est un jeu assez curieux et, pour divulgâcher ma conclusion (en même temps pas besoin d'être Herlock Sholmès quand on a vu la note), raté.
A priori le jeu évoque fortement Détective Conseil : l'univers de Conan Doyle, un ensemble de scénarios prédéfinis avec lieux à visiter, personnages à interroger et indices à collecter et, donc, un jeu d'enquête et de déduction. Sauf que le jeu est ici compétitif et que cela change radicalement la donne.
- déjà, et c'est là pour moi un gros point noir, le jeu devient solitaire et silencieux ; il n'y a pas le moindre échange entre les joueurs. Ce qui me paraît dommage dans l'absolu pour un jeu d'enquête (et assez peu thématique par ailleurs) et participe d'une ambiance assez morne autour de la table,
- ensuite parce que Watson & Holmes essaye d'apporter une animation ludique via un aspect gestion avec divers jetons qui permettent de compliquer l'accès à certains indices ou de créer (enfin en théorie) un côté course contre le temps avec les enchères de jetons calèches. Sauf que cette surcouche est quand même très superficielle et d'un intérêt pratique pas toujours évident.
Pour ma part le parti pris du jeu se révèle un échec, autant sur le plan ludique (trop limité et artificiel) que sur le plan de l'ambiance (absence de communication). Je comprends l'intention mais un titre absolument compétitif sur le modèle de Détective Conseil me semble compliqué à mettre en oeuvre, et certainement pas de cette manière.
Par ailleurs je trouve l'aléa un peu trop important selon les enquêtes, avec certains indices vraiment très déterminants (et donc à l'avantage de ceux qui profitent très tôt de la meilleure grille de lecture).
Isle of Skye est un jeu de pose de tuiles très proche de Carcassonne dans le principe ; on a connu pire référence me semble-t-il.
Mais il s'en démarque élégamment avec son système d'enchères, à la fois simple et redoutable : à chaque tour les joueurs piochent trois tuiles qu'ils placent devant eux puis, secrètement, sélectionnent une tuile à défausser parmi les trois et attribuent une valeur en or (minimum 1) aux deux autres. Les enchères sont révélées et les tuiles concernées défaussées. Ensuite dans l'ordre du tour chaque joueur peut acheter une et une seule tuile à un autre joueur, en payant au joueur concerné la somme associée (ce joueur récupère en plus sa mise).
Ensuite tous les joueurs récupèrent leurs tuiles qui n'ont pas été achetées en défaussant l'or de l'enchère !
Le reste est classique, avec un système de score particulièrement bien maîtrisé, et contribue à faire de Isle of Skye un classique instantané du jeu à l'allemande, tellement simple qu'il en paraît évident, malin et profond.
Un Spiel amplement mérité de mon point de vue, même si le jeu a aussi trouvé pas mal de détracteurs - j'ai l'impression que le style à l'allemande est un peu passé de mode.