D'abord, je reconnais que ce jeu dispose de matos et de mécaniques absolument superbes, un véritable aboutissement de game design, tout s'encastre et vit sous nos yeux avec dynamisme et précision. Par contre, il donne vraiment l'impression de jouer tout seul, un peu comme une "démo". On pourrait le qualifier de "jeu de placement sans majorité mais à objectifs secrets", ce qui explique déjà son côté aléatoire, presque "non jeu décoratif'. Dans d'autres jeux familiaux à objectifs secrets comme Clans, Bang ou Heimlich and Co, on a tout de même l'impression de faire quelque chose (en gros dans ces trois jeux on a la main pour faire perdre des points à certains joueurs mais il ne faut pas le faire de façon trop évidente si on ne veut pas se faire soi-même attaquer, ça fonctionne hyper bien, alors que le coté secret de Takenoko il est un peu peau de balle). Alhambra aussi donnait une impression de ne gagner que par hasard, mais au moins il fallait faire un peu de calcul mental. Ici c'est juste joli, amusant et gratifiant... peut-être un précurseur de nouvelles générations de jeux sans but, sans vainqueur, juste agréables à jouer???
Un concept original de construction par tétris, ultra simple, fluide et rapide, mais pas dénué de profondeur si on la cherche: les calculs et stratégies d'optimisation sont variés, "à taille humaine", on ne se grillera pas les neurones ici mais si on veut se prendre un peu la tête ya moyen. Par exemple on ne comprend pas bien l'intérêt de l'usine avant d'avoir fait quelques parties avec les cartes de base, en voyant ce qui se passe vers la fin quand on manque de place, puis on met en jeu des cartes plus complexes, c'est très bien vu cette évolution du niveau et ça suggère à fond des extensions.
La variabilité d'une partie à l'autre selon les cartes tirées (avec aussi la super carte secrète) fait donc de ce petit jeu un must-have actuel, dont on apprend les règles en une minute mais qu'on passera la soirée entière à rejouer (les parties sont très rapides car c'est effectivement une très petite ville).
Cerise sur le gâteau: les dessins sont magnifiques, et malgré leur aspect moderne on constate avec satisfaction l'absence de tout gnome photoshop faisant un selfie souriant.
Le jeu est très sympathique de prime abord, il attire les plus jeunes par ses couleurs, ses morceaux d'île amovibles, ses maisons de couleurs cachées rappelant Clans et ses cartes d'action un peu à la El Grande. Hélas, il ne possède ni le minimalisme acétique du premier ni l'emphase exubérante du second: on est surtout dans un joyeux bazar très souvent frustrant. Ce qui m'amène à évoquer son côté chaotique, incontrôlable, qui n'est pas exactement le problème du jeu, c'est plutôt son injustice abusive ! Le vrai chaos a son avantage, c'est qu'il renouvelle le jeu, casse le côté control freak de certains jeux velus trop sérieux et purement comptables: un jeu fun peut parfaitement faire survenir des événements incontrôlables ou des coups fourrés impossibles à contrer, ce qui collerait bien ici avec le thème de l'Atlantide. Dans Vineta cependant, on tire régulièrement une main ingrate dépourvue d'une certaine catégorie de cartes, sans laquelle les autres cartes ne servent pas à grand chose. Cette mauvaise main qui se renouvelle très lentement va nous obliger à jouer des cartes pour rien, subir le jeu des autres sans même s'amuser à le perturber. Ce système de main à 7 cartes et de séries d'inondations partait d'une bonne intention mais ne fonctionne qu'à moitié, de façon très déséquilibrée: c'est pas vraiment du chaos mais de l'arbitraire. Un jeu comme Condotiere donne une nette impression de chaos lié à la distribution, mais on prend toujours plaisir à tirer le meilleur parti de ses cartes, un peu comme au tarot. Dans Vineta, tout le monde a le même jeu de cartes personnel mais sa répartition ne produit que de la frustration : une sacrée contre performance de game design! Il aurait fallu faciliter un renouvellement possible de la main dans certaines conditions, c'est incroyable qu'ils n'y aient pas pensé. C'est donc un beau rendez-vous manqué, un jeu qu'on aurait vraiment aimé aimer, car le thème est super bien rendu, mais il nécessiterait un bon game doctor pour l'arranger! Tel quel, ses règles ressemblent beaucoup à un jeu amateur pas assez testé (un comble quand on sait qu'il s'agit du remodelage d'un jeu existant).
Un Shifumi évolué (3 résolutions successives à chaque tirage) avec la possibilité de se rappeler des cartes déjà jouées pour sortir la bonne au bon moment, j'imagine que ça s'est déjà fait, mais c'est le premier que je rencontre et il est aussi savoureux qu'un civet de lapin. Les règles se tiennent bien (on sent les nombreux tests là-dessous) les dessins sont sympa, le thème est bien rendu... Une bonne surprise, un jeu de voyage sympa, juste un poil trop complexe pour le maîtriser (il faudrait vraiment une aide de jeu avec icônes intuitifs).
... mais moins bien qu'un bazar bizarre!
Le jeu a des dessins sympas, il occupe toute la table en mettant un gros bazar pour étaler la prairie (les cartes à retourner). Au début ça semble de la pure chance, mais on trouve rapidement des tactiques en patientant avant d'activer ses joueurs déjà retournés -surtout si on utilise les variantes. Après quelques parties, la chance et l'adresse ont beaucoup moins d'importance. Excellent pour initier les enfants aux conditions de victoire (presque des "combos"), il colle assez bien à son thème et ne donne pas du tout l'impression de froideur de nombreux jeux allemands du même type.
Au final, même si la mécanique semble assez chaotique, il donne toujours envie de refaire une partie. Je pense que ce jeu est sous-estimé, surtout si on peut le chopper à 3 euros.
Ce qui est étonnant avec ce jeu de sentosphère, c'est que les parfums (qui offrent des ristournes sur les épices) sont complètement superflus et parasitent même le jeu, qui lui possède pourtant des mécanismes assez intéressants, en particulier la bourse des épices qui varie en permanence et va modifier nos plans de voyage. Les stocks sur les bateaux sont également astucieux, sauf dans la version à trous qui détruit le carton assez vite. Tout cela donne envie de le personnaliser, d'inventer quelques règles supplémentaires pour le rendre un peu moins, sec. Il y aurait sans doute moyen d'obtenir un jeu familial vraiment sympa, car le stock dans la cale et la bourse des épices constituent une base solide, qui manque simplement... d'épices!
Die baumeister von Arkadia ressemblait à une relecture de Médina, et Dorn nous livre ici sa version du That's life de Kramer. Très beau et pas cher du tout sur le marché de l'occasion, Emerald est principalement une course d'équipes intelligente comme son probable modèle précité, mais s'y greffe un cocktail de règles aussi amusantes que légèrement indigestes (déplacements aléatoires du dragon, gestion des cartes de bijoux, arrivée au trésor, était-ce bien nécessaire?). Même si on peut y jouer dès 7 ans, tout cela nécessite une très bonne explication avant la première partie, sans quoi les enfants (ou les plus grands) risquent fort de se plaindre en mode : "haaaa mais oui fallait le dire avant". C'est probablement ce petit aspect "chiant" (typique de son auteur, néanmoins excellent) qui prive ce jeu sympathique du statut de classique familial intelligent que possèdent d'autres courses ++ (Cartagena, Big Points, Le lièvre et la tortue...). Emerald additionne de petites contraintes arbitraires au lieu de nous laisser le temps d'expérimenter un mécanisme principal riche et profond (qui serait ici le mode d'avancée des pions). Dorn n'avait-il pas suffisamment confiance dans ce mécanisme de base? Cette accumulation de mini règles n'en fait pas un jeu désagréable, juste pas super fluide et donc un peu daté aujourd'hui où tout doit avancer sans heurts sur roulements ludiques ultra lubrifiés (cette remarque vaut aussi pour Waka Waka et Titania, jeux familiaux un peu arbitrairement prise de tête). A l'évidence, un jeu pour Dorn tient dans l'addition de ses mécanismes et leur équilibrage (idée de mouvement perpétuel parfait) plutôt que dans une vision d'ensemble cohérente et stimulante que viennent servir uniquement les mécanismes nécessaires.
Et bah moi j'ai pas du tout aimé. Je l'ai essayé bien 5 ou 6 fois et ça ne décolle pas du tout, je ne vois pas l'intérêt. Les dessins un peu steampunk sont sympa, mais vraiment je trouve que le processus de remise en ordre opposé est fastidieux, lourdeau.... allez, lâchons le mot... juste CHIANT! Le principal problème du jeu est que remettre des numéros en un ordre inversé tout en les modifiant presque tous, c'est un exercice totalement vain et poussif. Peut-être que s'ils avaient donné un sens à tout cela, ne serait-ce qu'une manière de différencier visuellement la grandeur des nombres, ça aurait pu être marrant. Allez je me risque: par exemple changer les simples wagons (numérotés par des nuages...what?) par des classes sociales, représentant des personnages plus ou moins bien vêtus, jusqu'au clochard, alors peut-être le défi de réorganiser l'ordre social aurait pu être un peu rigolo. Mais des wagons divers avec des numéros-nuages, franchement ça veut rien dire du tout vot' truc, c'est du 100% OSEF certifié. Et je suis amateur de jeux de trains, hein...
C'est le genre de jeu où l'on s'ennuie tellement qu'on s'en fout d'avoir perdu, tellement on n'a passé son temps qu'à soupirer et que l'on ne s'est pas investi du tout.
Pourtant il y avait des idées pas mal! Le choix "nombre ou pouvoir" avec des cartes double emploi, ça sent la mécanique de bon jeu. Mais la pioche de nombre c'est que de la chance et les pouvoirs sont ennuyeux, pas très funky ("oh je vais éliminer la carte du milieu de chacun d'entre nous! ...bah on s'en fout grave en fait").
Ce bon ptit jeu de placement, signé Schacht et situé à Francfort, est resté assez inconnu.
Sa règle est très simple mais astucieuse et équilibrée. Elle évite, à l'inverse certains autres Schacht (Zooloretto...) ces ennuyeuses exceptions et contraintes qui n'ont pas leur place dans un familial moderne. Un de ses grands avantages, c'est que l'on marque des points tout au long de la partie, il n'y a aucune phase de décompte laborieuse typique des Kramer/Knizia. En contrepartie, c'est pas un jeu super funky, car en fin de partie vous ne pouvez voir aucun témoignage de vos glorieux accomplissements: le plateau est rempli de jetons de couleurs et de grues dont on a oublié les poseurs, et il n'y a que votre pion sur la piste de score qui témoigne de votre grandeur ou de votre décadence !!! Simple mais quand même un poil intello donc...
Il faut dire que ce jeu appartient à la famille des jeux de placement sans attache, c'est à dire que vous ne placez pas VOS jetons mais DES jetons. Ces derniers sont définis par leur couleur et leur type de bâtiment, on peut les placer dans un quartier de la même couleur, où les bâtiments précédemment posés vous apportent leurs points en plus s'ils sont du même type que celui posé. Il n'y a donc pas réellement de majorités, juste des configurations différentes dans chaque quartier qui incitent à jouer tel ou tel coup, sachant que les joueurs suivants risquent de gagner encore plus de point avec "vos" constructions. Certains jeux impersonnels de ce type, comme Medina ou Mauer Bauer, peuvent parfois sembler tordus et ingrats ("je fais tout le boulot et c'est lui qui score!") mais ici, tout est clair, sans embrouille: vous finissez souvent par donner des points aux autres, mais vous pouviez facilement le prévoir en se rappelant de ce qu'ils avaient acquis ou bien en constatant ce qui était disponible à l'achat.
Cette main de 3 jetons, laisse un choix de placements limité et donc pas prise de tête, puis arrive la phase de réapprovisionnement qui est très astucieuse: le pion Maire tournant garantit un jeton bâtiment gratuit différent à chaque tour (comme une pioche gratuite pour refaire la main à 3 jetons quoi qu'il arrive), mais si on en a les moyens, on peut payer pour en choisir un autre sans doute plus intéressant (d'ailleurs, tout le monde peut voir les pièces des autres joueurs, qui sont d'un maximum de 3). D'autre part, ces pièces servent aussi à acquérir un grand bâtiments (coup bonus après avoir posé un bâtiment), et ces monuments peuvent scorer méchamment mais je vais pas trop rentrer dans le détail...
Retenons qu'à chaque tour amène son petit lot de questions, mais jamais trop, ce qui rend ce jeu accessible dès 7 ans avec une bonne explication. Attractif, pour les plus jeunes, par contre c'est pas gagné: comme je le disais au début, le fait de ne pas VOIR ses constructions reste tout de même un peu conceptuel.
Je pense que ce jeu simple et élégant, même s'il n'a pas vraiment de public cible (les fans du Francfort historique?) mérite d'être plus connu, surtout qu'il se trouve pour quelques euros et que je le trouve nettement meilleur que le bordélique Zooloretto, avec qui il a quelques points communs: on pourrait dire que les quartiers de Francfort sont les différents enclos d'un zoo commun et que l'on score aussi en mettant des animaux identiques ensemble, mais cette fois au fur et à mesure et avec la possibilité de les mélanger. Plateau commun (d'avantage d’interaction), score ajusté à chaque tour (moins d'ennui et vision claire), moins de contraintes: c'est CLAIREMENT un meilleur jeu, mais bien sûr ya pas de zolis zanimos et puis (je le répète une dernière fois) on ne VOIT PAS ce qu'on a fait pendant toute la partie...
Après, c'est pas non plus génial hein... juste un bon petit jeu de série B.
PS: Comme je ne trouvais plus les règles en français nulle part, je les ait remises sur BGG.
A ne pas confondre avec l'insipide version pour les moins de 6 ans qui possède le même titre, le même auteur et le même éditeur (quelle bonne idée!) ce Labyrinthe 3D est un jeu tout à fait intéressant, sans doute une des seules relectures du classique (avec Labyrinthe Master) qui égale voire dépasse le modèle. Sur un quadrillage mobile plus petit (une contrainte technique bienvenue qui réduit la durée des parties), vous avez cette fois un parcours en 3D qui le fait ressembler un peu à Torres: vos magiciens ne peuvent monter ou descendre que d'une marche de haut, les hauteurs supplémentaires demandant des cartes spéciales. A part ça le jeu est identique à l'original, donc très simple mais cette 3D ajoute un aspect très sympa pour le calcul de parcours, et comme d'habitude avec Labyrinthe on peut facilement inventer de nouvelles règles, par exemple inspirées de Torres, comme le fait de traverser un tunnel horizontal (en défaussant deux cartes spéciales identiques). L'accumulation de ces 3 types de cartes saut pourrait donner lieu à la confection de combos magiques variés permettant chacun un coup spécial comme celui des tunnels.
Attention le montage est costaud, un peu comme monter un meuble Ikéa, et il ne faut pas se planter en collant les étiquettes. Le matos, une fois monté est très sympa, à part les cartes qui sont beaucoup trop fines.
Autre idée de variante: les jolies tuiles à enlever du plateau de jeu, censées indiquer les tours à poser lors du premier montage puis destinées à être jetées, peuvent être empilées faces cachées. Lorsqu'un joueur est bloqué, il tire la tuile du haut et se téléporte sur ce lieu, ce qui lui prend un coup et ne le rapproche pas systématiquement mais peut faire jouer la chance pour inverser la vapeur lorque le sort s'acharne sur lui.
C'est un jeu superbe, d'une très grande durée de vie, du très grand Ravensburger ! Mais attention avec la règle de base qui demande vraiment des éclaircissements, et encore plus attention avec les règles alternatives qui circulent, comme la règle anglaise completement anti fun. Si vous clarifiez la règle d'origine, vous avez avec ce matériel sublime une course évoluée de la trempe de Hasel und Igel. Alors il faut insister sur ces points:
- Vous bénéficiez du vent quoi qu'il arrive contrairement à ce que dit la règle anglaise. Ce bonus de vent est à appliquer à la fin de votre mouvement induit par la pause de carte et pas au début, et pas seulement si vous faites un mouvement horizontal ! Si vous choisissez de ne pas jouer de carte, vous tombez vers le bas de 1 dans la zone jaune ou avancez de 1 ou 2 vers la droite dans les zones de vent, et ça ne vous empêche pas d'utiliser en plus une tuile de direction (qui joue dans la même catégorie bonus que les zone de vent).
- On ne peut pas se cogner dans les obstacles et on ne sort pas du plateau: si on a pas la bonne carte on peut passer son tour pour changer une carte. Si on n'apprécie pas ce genre de situation, on peut jouer à la variante à 5 cartes qui les minimise grâce à un plus grand choix d'actions. De même, le jeu avec le dé est à utiliser surtout avec des joueurs inexpérimentés qui veulent des retournements de situation dus à la chance (enfants...).
- Il reste un point obscur: que faire lorsqu'on tombe (suite à un choc avec un autre joueur) sur un obstacle du sol ? Personnellement j'aime bien placer le pion à l'endroit où il est tombé sur la coulisse elle-même, il faudra donc en premier un mouvement vers le haut pour s'en dégager, un peu comme si on était empêtré dedans.
Au final, une fois qu'on joue avec les bonnes règles, le jeu garde un unique defaut: quand on commence à passer en tête on a déjà une bonne chance de gagner, car les combos vraiment dingues pour provoquer un retournement de situation n'existent pas vraiment! Il ne reste que les étoiles et le dé mais ce n'est que de la chance ! Dommage car ça aurait été facile d'inventer de pareils combos un poil plus compliqués...
Ce titre de "Prime aux cochons" concerne un point de bonus infime, une sorte de mini règle plutôt inutile, mais il semble étrange d'en tirer le titre de tout le jeu.
A part ce détail, tout est vraiment impeccable. La concurrence et la tension sur la journée de marché est vraiment bien rendue, car les premiers meeples paysans seront les mieux servis, mais ce n'étaient pas forcément les premiers posés, et ils peuvent se faire bloquer. Une bonne part du choix dépend de ce qu'on a déjà en stock: on se retrouve à haranguer les autres joueurs pendant leur propre choix d'animaux: "Mais laisse donc ceux-là, ça te servira à rien, à part à m'embêter!". Contrairement à la règle sans intérêt de la prime au cochons, la possibilité de faire des groupes d'animaux disparates à la dernière manche (du moment qu'ils scorent le plus faible du lot) est une bonne façon de terminer la partie sans frustration. C'est du pur jeu de collection, qui attirera donc les enfants (jouable en réalité dès 6 ans), mais c'est du collection +++ (c'est un genre qui me gave très facilement s'il n'est pas +++), avec 4 manches, et dans chacune un parcours en 3 étapes pour nos animaux: dans les colonnes où on les acquiert sur le marché, puis une étape intermédiaire où on devra les nourrir, et enfin bien au chaud à la ferme, prêts à scorer), le tout avec une fluidité extrême, qu'on ne devine pas vraiment à la lecture de la règle, plutôt mal traduite (ça à l'air plus compliqué que ça ne l'est). Le point qui semble le plus bizarre à la lecture de ces règles, c'est les bottes de foin et le sac de graines, qu'on peut (et parfois doit) utiliser immédiatement ou bien les mettre de côté pour les jours suivants: au final, c'est ce genre de détail réaliste "à la agricola" qui fait que ce jeu est beaucoup moins abstrait qu'une énième variante du rami (donc si vous haïssez comme moi les jeux de collection idiots, aucune crainte celui-là est très malin).
Très bon équilibre entre enchères simultanées et négociations aggressives (en mode OPA sur les bestiaux), ce jeu à la fois bourrin et très finaud (apéro intelligent ?) se situe à mi chemin entre le froid Medici (enchères propres chacun son tour, stratégie sur le stock) ou le chaud Carambouille (échanges libres très animés en mode fête du slip + cartes speciales pour les coups bas). Ces trois-là sont à préférer à ceux de Rudiger Dorn, qui bien que spécialiste du jeu de commerce/collection, pond systématiquement des règles ultra incohérentes qui ne servent que son obsession du mecanisme parfait (vases communiquants) et decevront tous ceux qui veulent comme moi avoir l'impression d'être de vrais marchands.
Pour en revenir à Tope-Là, son gros avantage c'est son double mecanisme, la négociation-OPA rajoutant une couche d'agressivité sur la simple enchère et garantissant de jouissives montées d'adrénaline et autres joyeux pétages de plombs, et ça brise la douce monotonie d'un Medici (faut-il préciser que Medici est tout de même le meilleur jeu d'enchères au monde ?)
ok, à ma 10 ème partie environ je conclus que c'est un beau jeu, intelligent, subtil et sans doute excellent... mais pas pour tout le monde, et en tous cas pas pour moi! La regle de base (la pose de 2 pieces insuffisante pour aggrandir ET revendiquer ces pièces) implique des stratégies très obliques, tordues, frustrantes et contre-intuitives. Si vous cherchez un jeu de placement par petites touches (2 pieces) qui soit moins tordu sans pour autant tomber dans le bêta, allez voir du côté de China ou La traversée du desert, vos joueurs tireront moins la tronche. Medina c'est clairement un jeu bonzaï, sorte d'expérience ludique menée aux frais du joueur masochiste pour savoir jusqu'où on peut contraindre une stratégie comme un bonzaï, réduite à utiliser le peu qui lui reste et gagner dans un mini mouchoir de poche, un peu comme l'austère Go West, que je lui préfère toutefois pour son astucieux système de majorité tournante progressive (le vol de points y est donc moins soudain et frustrant).
Ce jeu "justement sous-estimé" est bon mais injouable! Il est simplement "trop" bien pour son style familial, et la première partie est vraiment 100% kzmoulox. Les règles de déplacement (comme des reines des echecs qui subiraient un dégât des eaux progressif) sont certes accessibles et attrayantes, mais le scoring des objets est étrange et reclamerait quelques explications absentes de la règle. Il faut donc mettre au point un briefing en début de partie, sinon vos joueurs se diront tout du long "mais comment on marque des points dans ce bazar ??? c'est juste du hasard ou quoi ??? ". Certes, il est impossible de deviner combien il restera de tuiles d'une certaine couleur (pour décider si l'on collectionne ou non les objets de cette couleur) car en effet cela correspond aux cartes écartées par hasard en début de partie. Il faudra donc tout observer pour déduire ce qui se trouve dans cette défausse mysterieuse, en commençant par son propre jeu (on a peut être plein de cartes d'une couleur), puis celui des autres qui se révèle petit à petit (toujours se souvenir qu'ils jouent leur carte la plus basse) et à un moment on changera peut-être son fusil d'epaule en se rendant compte qu'une autre couleur semble meilleure, tout en faisant attention à ne jamais arrêter son pion sur une tuile menacée à cet instant. La clé c'est de regarder à combien en sont les joueurs. Par exemple, si l'on joue déjà tous au dessus de 5 et qu'il reste déjà 3 tuiles rouges en dessous de 6, le rouge ne vaudra certainement pas grand chose à la fin. Des prévisions comme ça, on peut passer tous les tours des autres à en faire, et c'est génial de ne pas rester passif. C'est riche, multidimensionnel, beaucoup trop subtil pour un jeu familial, mais lorsqu'on a émis une théorie qui s'avère gagnante et qu'on termine avec plein d'objets d'une couleur gagnante la gratification est totale ! Vraiment dommage que la notice n'attire pas l'attention sur ces tactiques, car c'est l'essence même du jeu, beaucoup plus que les déplacements et les gondoles de sauvetage, qui elles sont expliquées à renfort d'exemples inutiles.
Après, ya des méthodes pour rendre le jeu plus lisible. Par exemple placez systématiquement les cartes jouées par couleurs en colonnes (les chiffres demeurant visibles) au lieu d'un simple tas. Ainsi on se rend compte beaucoup plus facilement de tout ce qui n' est pas tombé (cun peu comme les mini-dés sur les villes de Magna Grecia).
China (ou kardinaal une Konig) pourrait ressembler an jeu idéal de transition douce vers les placements/scoring complexes, mais il a un côté vraiment trop froid et répétitif qui me le rend antipathique et ne me donne absolument pas envie d'y retourner. Patrizier du même auteur est proche mais plus drôle et rapide.
Contrairement à la règle ci-haut nous jouons en laissant un joueur bouger autant de pions qu'il veut IMMEDIATEMENT après avoir créé la connexion, dans le même tour (et cette zone est protégée au tour suivant par le pion rouge). Comme ça on a un jeu rapide et pas d'anti jeu, c'est top, on s'amuse beaucoup avec mon fils de 6 ans... Un des meilleurs jeux d'initiation avec Bison de Randolph.
Je ne comprends pas du tout les critiques qui taxent Kontor (ou Amsterdam) d'ennuyeux, à part bien sûr qu'il fait très "vieux", en particulier dans la rédaction des règles, et il date effectivement de 1999, c'est à dire avant les deux autres jeux qu'il m'a rappelé et que je cite juste après. En effet, on construit peu à peu un carré ,comme dans Kingdomino, mais sur un territoire commun d'affrontements majoritaires, comme dans Carcassonne. On choisit d'abord une carte de sa main de 5, le plus grand chiffre joue en premier et certaines cartes obligent l'autre à payer. Les cartes des deux joueurs peuvent se juxtaposer pour former des zones portuaires à partir desquels on déterminera des majorités sur les marchandises produites par chacun (rendues très visibles par de petits entrepôts qu'on centralise sa la première carte posée). Le principe de majorités est simple à gérer et néanmoins original et équilibré: le plus grand différentiel sur n'importe quel produit gagne, ce qui rapporte 1 point de victoire et permet la pose d'un gardien, puis à la fin on regarde qui a les plus grands territoires gardés, ce qui rapporte encore des points. Si l'on ne trouve rien d'intéressant à jouer ou que l'on a besoin d'argent, on peut ne pas jouer et gagner un florin, ou jouer un canal et gagner la même somme (pour service public, un peu comme jouer les dés dans Camel Up). On reprend toujours de quoi compléter une main identique en canaux et quais à la fin du tour (l'équilibre, toujours l'équilibre). Le pion bateau et la carte grue, ainsi que des cartes canaux optionnelles permettent des retournements de situations intéressants et une plus grande durée de vie du jeu. Un détail amusant qui révèle la grande liberté de ce jeu, c'est que l'on n'est même pas obligé de s'affronter systématiquement: on peut aussi créer certaines zones complètement indépendantes en essayant de former de grandes zones pour être dans le top 5 à la fin, mais attention alors à ne pas se faire piquer sa zone par un changement de stratégie du joueur adverse. Et puis il y a la possibilité de changer le plan des canaux, notamment en suivant les variantes proposées à la fin de la notice.
Evidemment, avec cette grande liberté de pause et les différentiels des 3 marchandises à prendre en compte pour déterminer une seule victoire par territoire, ce jeu ne pourrait pas bien fonctionner à plus de 2 joueurs, même avec des jeux de cartes supplémentaires: on se retrouverait dans un chaos total jouable uniquement par des génies des maths. Cette complexité apparente ne doit pas vous effrayer car elle vous fait sortir du train-train de comptage mécanique propre aux deux classiques précités, on est vraiment dans du jeu créatif un peu fou à la Colovini.
Et la règle, très pointilleuse et old school, peut en effet donner une fort désagréable sensation de complexité arbitraire, mais ce serait facile de la reformuler clairement sur une seule feuille, en allant à l'essentiel comme le font les jeux modernes (alors que là tout ce que l'on peut faire ou pas est inutilement spécifié dans de longs paragraphes poussifs).
Le point positif de ces critiques négatives à mon avis injustifiées, c'est que sans doute grâce à elles on trouve ce très beau jeu pour littéralement une poignée d'euros. Il faudrait un jour faire un post "expérience de ludothèque à 30 euros maximum": j'ai ainsi aquis Intrigue à Venise (2), Le Tapis Volant (2,5), Amsterdam (2), Maharadja (4), Palazzo (2), Top Race (3), Grand Safari (3), Hermagor (3), Leonardo da vinci (2), Torres (5), Bonhanza (2). De quoi faire avec ces jeux magnifiques un peu (ou parfois complètement) oubliés, tout cela pour à peine le prix d'un jeu neuf.
Aquatika est en quelque sorte une suite du magnifique Bison d'Alex Randolph. Ressemblant tout autant à une initiation aux échecs, il s'adresse cependant à des enfants un peu plus agés du fait de ses contraintes plus nombreuses. Certaines règles sont géniales (surtout la pieuvre), d'autres un peu casse-bonbons (l'emplacement pour gagner, les coups fourrés du poisson volant, l'impossibilité de reculer parfois cruelle en défense). Cette première édition au plateau jaune et gris (beuaaark) n'est vraiment pas belle, voire carrément ratée, mais la manipulation des pièces reste agréable.
A partir de 7 ans bien sonnés ou entre adultes, ce jeu vous réserve de sympatiques parties rapides mais il demeure une impression de fouillis tactique qui n'incite pas à crier au chef d'oeuvre. Je préfère ressortir Bison pour la millième fois!
PS: La règle du poisson est confuse, car du fait de la première phrase on peut vraiment croire qu'il pourrait sauter plusieurs pièces alignées en un seul saut. Comme l'exemple illustré ne le montre pas, on finit par supposer que ce n'est pas le cas, mais un doute persiste.